Le Conseil constitutionnel, par sa décision du 8 mars 2018, a examiné la conformité à la Constitution de la loi relative à l’orientation et à la réussite des étudiants. Plusieurs députés ont saisi l’institution afin de contester les nouvelles modalités d’accès au premier cycle de l’enseignement supérieur, jugeant certains dispositifs contraires aux droits fondamentaux. Les requérants soutenaient notamment que la procédure nationale de préinscription et les mécanismes de départage des candidats portaient atteinte au principe d’égalité et à l’indépendance des enseignants-chercheurs. La question posée au juge constitutionnel consistait à déterminer si le législateur pouvait instaurer des critères de sélection et d’accompagnement sans méconnaître les exigences constitutionnelles d’accès à l’instruction. Les sages ont validé l’essentiel de la loi en considérant que les mesures adoptées reposaient sur des critères objectifs et rationnels destinés à favoriser la réussite étudiante. Cette décision confirme la constitutionnalité du nouveau système d’orientation tout en encadrant les pouvoirs reconnus aux autorités académiques et aux chefs d’établissement.
I. L’affirmation d’un cadre législatif pour la sélection et l’accompagnement des étudiants
A. La validation de critères d’admission objectifs subordonnés à un projet de formation
Le législateur a instauré une procédure où l’inscription peut être « subordonnée à l’acceptation par le candidat du bénéfice des dispositifs d’accompagnement pédagogique » adaptés à ses compétences. Cette conditionnalité de l’accès au premier cycle ne constitue pas une barrière arbitraire mais un mécanisme visant à assurer la cohérence entre le profil de l’élève et sa formation. Le Conseil constitutionnel précise que les établissements peuvent tenir compte des acquis et compétences des candidats pour proposer des « parcours de formation personnalisés » favorisant leur réussite. Les juges soulignent que le législateur a ainsi « retenu des critères objectifs et rationnels » dont il a suffisamment précisé le contenu pour garantir le respect de l’égalité. La loi prévoit également que les inscriptions sont décidées au regard de la cohérence entre le projet de formation du candidat et les caractéristiques de la filière demandée. Ces dispositions permettent d’écarter le grief d’incompétence négative car le Parlement a défini avec assez de précision le cadre des décisions prises par les chefs d’établissement.
B. L’organisation temporelle de la procédure de préinscription garante du recours effectif
La loi dérogatoire au droit commun prévoit que le silence gardé par un établissement sur une candidature ne fait naître aucune décision implicite de rejet immédiate. Les requérants dénonçaient ici une atteinte substantielle au droit à un recours juridictionnel effectif en empêchant la contestation rapide des refus d’admission par les candidats. Le Conseil rejette cet argument en expliquant que cette mesure tient compte de la « durée et des caractéristiques de la procédure de préinscription » gérée nationalement. L’institution affirme que le texte garantit la « naissance d’une décision implicite de l’administration au plus tard à la fin de la procédure » de sélection annuelle. Cette solution permet aux étudiants d’exercer leurs droits devant le juge administratif une fois que l’ensemble des choix formulés ont été traités par la plateforme. Dès lors, les dispositions ne portent aucune atteinte aux exigences de l’article 16 de la Déclaration de 1789 puisque le recours demeure possible à l’issue du processus.
II. La préservation tempérée des principes fondamentaux régissant l’enseignement supérieur
A. L’absence d’atteinte caractérisée à l’indépendance constitutionnelle des enseignants-chercheurs
Les requérants affirmaient que la diffusion de statistiques de réussite et d’insertion professionnelle pour chaque formation privilégiait une logique utilitariste nuisant à la liberté académique des professeurs. Selon les députés, cette pression chiffrée pourrait contraindre les enseignants à modifier leurs exigences pédagogiques pour améliorer artificiellement les résultats de leurs établissements respectifs. Le Conseil constitutionnel balaie ces craintes en jugeant que la définition des « informations fournies aux candidats au cours de la procédure de préinscription » ne met pas en cause ce principe. L’indépendance des universitaires reste protégée tant que les données statistiques ne dictent pas le contenu de leurs enseignements ou les modalités souveraines de leurs évaluations. De même, confier à l’autorité académique le soin d’arrêter les capacités d’accueil des formations ne constitue pas une ingérence illégitime dans les prérogatives des chercheurs. La « détermination des capacités d’accueil des formations universitaires » est une mesure d’organisation administrative qui ne touche pas au cœur de la liberté d’enseignement et de recherche.
B. La mise en œuvre équilibrée de l’égal accès à l’instruction pour tous les candidats
L’exigence constitutionnelle de l’égal accès à l’instruction impose à la Nation de garantir à chaque citoyen la possibilité d’acquérir les connaissances nécessaires à son épanouissement professionnel. Le Conseil vérifie si les mécanismes de départage utilisés lorsque les demandes excèdent les capacités d’accueil ne créent pas de discriminations injustifiées entre les futurs étudiants. Les juges constitutionnels estiment que le recours à des critères fondés sur le projet de formation et les compétences antérieures assure une sélection neutre et transparente. L’attention particulière portée aux « aménagements et des adaptations dont bénéficient les candidats en situation de handicap » est également validée par la haute juridiction. Le Conseil affirme que c’est « aux fins de favoriser la réussite des candidats en situation de handicap » que le législateur a prévu ces dispositions spécifiques. L’ensemble du dispositif apparaît donc conforme au principe d’égalité devant la loi car il traite différemment des situations distinctes dans un but d’intérêt général évident.