Conseil constitutionnel, Décision n° 2018-776 DC du 21 décembre 2018

Par une décision n° 2018-776 DC du 21 décembre 2018, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur la conformité de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019. Des députés ont saisi la juridiction afin de contester tant la procédure d’adoption du texte que la constitutionnalité de plusieurs de ses dispositions matérielles. Les requérants invoquaient notamment une méconnaissance du droit d’amendement et une atteinte aux principes d’égalité devant la loi et devant les charges publiques. Ils critiquaient également des mesures relatives à la revalorisation des prestations sociales ainsi que l’insertion de dispositions considérées comme étrangères au domaine financier. La question posée au Conseil consistait à déterminer si les délais d’examen et les réformes sociales respectaient les exigences constitutionnelles et le domaine organique. Les sages déclarent la procédure conforme et valident l’essentiel des mesures de fond, tout en censurant les dispositions dépourvues d’incidence financière directe.

**I. La préservation de la régularité procédurale et des équilibres sociaux**

**A. L’exercice effectif du droit d’amendement parlementaire**

Le Conseil constitutionnel écarte d’emblée les critiques relatives aux délais d’examen du projet de loi, jugés compatibles avec les prérogatives des membres du Parlement. Il souligne que le délai de dépôt en commission « n’a pas fait obstacle à l’exercice effectif par les députés de leur droit d’amendement ». Les sages considèrent que les bases des amendements étaient connues suffisamment tôt pour permettre une discussion utile malgré la rapidité de la nouvelle lecture. Cette solution confirme une jurisprudence établie qui privilégie la continuité du débat législatif tant que les droits fondamentaux des élus sont respectés.

**B. La validation des réformes au regard du principe d’égalité**

L’institution d’une réduction de cotisations sur les heures supplémentaires ne constitue pas une rupture d’égalité entre les travailleurs effectuant des durées de travail différentes. Le juge précise que les dispositions litigieuses « n’instaurent ni différence de traitement ni rupture d’égalité devant les charges publiques » entre les diverses catégories de salariés. De même, la modulation des sanctions en cas de travail dissimulé repose sur des critères objectifs liés à l’ampleur et à la nature du manquement. Le législateur peut légitimement proportionner la mesure à l’importance de l’infraction constatée sans méconnaître les principes fondamentaux de la Déclaration de 1789.

**II. La sanction du non-respect du domaine des lois de financement**

**A. L’exclusion rigoureuse des cavaliers sociaux**

Le Conseil constitutionnel censure plusieurs articles au motif qu’ils n’auraient pas dû figurer dans une loi de financement de la sécurité sociale. Il juge que certaines mesures « n’ont pas d’effet ou ont un effet trop indirect sur les dépenses des régimes obligatoires de base » de la protection sociale. L’article 45 relatif aux expérimentations pour l’innovation et l’article 50 concernant la dématérialisation des arrêts de travail sont déclarés contraires à la Constitution. Cette rigueur protège l’intégrité du domaine réservé aux lois financières et évite l’encombrement des textes par des réformes purement administratives.

**B. La limitation temporelle des mesures de revalorisation**

La fixation d’un taux de revalorisation des prestations sociales à 0,3 % est validée pour l’année 2019 malgré le décrochage par rapport au niveau de l’inflation. Cependant, le juge constitutionnel censure les mots « et 2020 » car ces dispositions ne relèvent pas de l’année pour laquelle la loi de financement est votée. Il estime que ces mentions « ne présentent pas un caractère permanent » et ne trouvent donc pas leur place dans la loi de financement pour 2019. Par cette décision, le Conseil rappelle l’importance du principe d’annualité et limite strictement les velléités du législateur d’engager les finances sociales sur le futur.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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