Conseil constitutionnel, Décision n° 2020-846/847/848 QPC du 26 juin 2020

Par une décision du 26 juin 2020, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur la conformité des sanctions pénales applicables durant l’état d’urgence sanitaire. La juridiction était saisie de trois questions prioritaires de constitutionnalité portant sur la répression de la violation réitérée des mesures de confinement obligatoire. La Chambre criminelle de la Cour de cassation a transmis ces interrogations le 13 mai 2020 afin d’apprécier le respect des principes de légalité et de proportionnalité. Des individus faisaient l’objet de poursuites pénales pour avoir méconnu, à plus de trois reprises, l’interdiction de déplacement hors de leur domicile habituel. Les requérants soutenaient que les termes de la loi étaient trop vagues et que le délit présentait un caractère automatique contraire à la présomption d’innocence. Le Conseil constitutionnel a déclaré les dispositions conformes en soulignant que le juge peut contrôler la régularité des verbalisations antérieures pour écarter tout arbitraire. Cette analyse invite à examiner la clarté de la loi pénale d’exception avant d’envisager la protection des garanties fondamentales dans ce cadre répressif spécifique.

**I. L’affirmation de la clarté de la loi pénale d’exception**

**A. La précision terminologique des éléments de l’incrimination**

Le principe de légalité des délits et des peines impose que le législateur définisse l’infraction de manière suffisamment claire pour éviter des décisions de justice arbitraires. Les requérants critiquaient ici les notions de besoins familiaux ou de santé ainsi que le terme de verbalisation car ils les jugeaient trop équivoques. Toutefois, les sages estiment que ces références « ne présentent de caractère imprécis ou équivoque » dans le cadre juridique très particulier défini par la loi d’urgence. Cette précision permet ainsi aux citoyens de connaître exactement l’étendue de leurs obligations et de prévoir les conséquences juridiques de leurs actes de déplacement.

**B. Le respect de la compétence législative dans la définition du délit**

Le législateur doit fixer lui-même les règles concernant la détermination des crimes et délits en vertu de l’article 34 de la Constitution de la République. Le Conseil constitutionnel considère que le législateur a défini les éléments essentiels de l’interdiction de sortir tout en prévoyant des exceptions qui restent strictement limitées. L’intervention du pouvoir réglementaire demeure encadrée par l’objectif de garantir que les mesures prises soient strictement proportionnées aux risques sanitaires graves encourus par la population. La loi détermine donc suffisamment le champ de l’obligation pénale, assurant ainsi une base légale solide à la répression des comportements jugés dangereux.

**II. La garantie de l’équilibre entre sûreté publique et droits individuels**

**A. La protection effective de la présomption d’innocence par le juge**

La présomption d’innocence interdit au législateur de créer des délits automatiques qui ne permettraient pas au juge d’apprécier la réalité des faits reprochés au prévenu. Les sages précisent que le tribunal correctionnel « apprécie les éléments constitutifs de l’infraction et notamment la régularité et le bien-fondé des précédentes verbalisations » effectuées. Le juge ne se contente pas de constater l’existence matérielle des procès-verbaux mais doit vérifier que les infractions initiales étaient légalement et factuellement caractérisées. Cette faculté de contrôle juridictionnel effectif garantit le respect des droits de la défense malgré la rapidité de la procédure de verbalisation par les autorités.

**B. La validation d’une répression proportionnée aux risques sanitaires**

Le grief relatif à la proportionnalité des peines est écarté car le délit sanctionne la quatrième violation, constituant ainsi un fait distinct des premières contraventions simples. Les peines de six mois d’emprisonnement ne sont pas jugées manifestement disproportionnées au regard des risques sanitaires mettant gravement en péril la santé de la population. La décision souligne que l’incrimination vise à assurer le respect des mesures nécessaires durant une période exceptionnelle de catastrophe sanitaire aux conséquences humaines potentiellement tragiques. L’équilibre entre la protection de l’ordre public sanitaire et les libertés individuelles est ainsi maintenu par une sévérité graduée sous le contrôle judiciaire.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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