Conseil constitutionnel, Décision n° 2020-856 QPC du 18 septembre 2020

Le Conseil constitutionnel, par une décision n° 2020-856 QPC du 18 septembre 2020, s’est prononcé sur la constitutionnalité de dispositions relatives à l’indemnisation de mineurs.

Des mineurs licenciés pour faits de grève en 1948 et 1952 bénéficiaient d’allocations réparatrices instituées par la loi de finances pour 2015. Des requérants ont soulevé une question prioritaire de constitutionnalité devant la Cour de cassation, critiquant des conditions restrictives d’accès à ces prestations financières. La loi subordonnait le bénéfice des indemnités à l’instruction préalable d’une demande de prestations de chauffage par le mineur ou son conjoint. Elle exigeait également que les demandes soient formées avant une date butoir fixée arbitrairement au premier juin deux mille dix-sept. La juridiction constitutionnelle doit déterminer si ces restrictions administratives méconnaissent le principe d’égalité garanti par la Déclaration de 1789. Le Conseil censure ces dispositions car « ces différences de traitement sont sans rapport avec l’objet de la loi » visant à réparer les préjudices subis. L’analyse portera d’abord sur la condamnation de critères d’éligibilité discriminatoires avant d’étudier l’affirmation de la fonction réparatrice de la législation.

I. La condamnation de critères d’éligibilité discriminatoires

A. L’arbitraire des conditions de saisine administrative

Le législateur imposait l’instruction d’un dossier par une agence nationale pour ouvrir le droit aux allocations forfaitaire et spécifique. Cette condition excluait les héritiers dont les parents n’avaient pas sollicité de prestations sociales spécifiques de leur vivant. Le Conseil relève que « ces dispositions opèrent une différence de traitement » selon que le mineur a pu solliciter ou non ces aides. La distinction repose ainsi sur des démarches étrangères au préjudice que l’État entendait pourtant solennellement reconnaître et réparer.

B. L’inconstitutionnalité d’un délai de forclusion restrictif

La loi prévoyait que les demandes de bénéfice aux allocations devaient être adressées impérativement « jusqu’au 1er juin 2017 ». Ce terme rigide interdisait toute indemnisation pour les descendants découvrant leurs droits après l’extinction du délai légal. Une telle barrière temporelle créait une rupture d’égalité injustifiée entre les familles des mineurs victimes de licenciements abusifs. Les juges considèrent que cette limitation porte une atteinte excessive aux droits fondamentaux des requérants exclus du dispositif.

II. L’affirmation de la fonction réparatrice de la loi

A. Le contrôle de l’adéquation entre le moyen et l’objet

Le principe d’égalité autorise des traitements différenciés à condition qu’ils soient en rapport direct avec l’objet de la norme. La loi de finances visait ici à réparer les atteintes portées aux droits des mineurs grévistes et de leurs familles respectives. L’exigence de formalités antérieures sans lien avec le licenciement pour grève ne constitue pas un critère objectif et rationnel. La juridiction souligne que « le principe d’égalité ne s’oppose pas » à des différences justifiées par des raisons d’intérêt général.

B. La primauté de l’égalité devant la réparation

L’article 6 de la Déclaration de 1789 dispose que la loi « doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse ». La déclaration d’inconstitutionnalité entraîne l’abrogation immédiate des segments de phrase restreignant l’accès aux fonds d’indemnisation. Cette décision garantit que tous les enfants de mineurs licenciés percevront désormais l’allocation spécifique indépendamment des dossiers passés. Cette déclaration d’inconstitutionnalité est ainsi applicable à toutes les affaires qui n’ont pas encore été jugées définitivement.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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