Le Conseil constitutionnel, par une décision rendue le 31 mars 2023, s’est prononcé sur le respect des obligations de financement des campagnes électorales législatives. Un candidat aux élections législatives de juin 2022 a obtenu plus de 1 % des suffrages exprimés lors du premier tour de scrutin. Le compte de campagne a été déposé le 14 octobre 2022 bien que le délai légal expirait impérativement le 19 août précédent. Le document produit n’a fait l’objet d’aucune présentation par un expert-comptable malgré un montant de recettes excédant le seuil réglementaire. Saisi par l’autorité de contrôle des comptes, le juge constitutionnel doit déterminer si ces omissions constituent des manquements justifiant une déclaration d’inéligibilité. La juridiction retient que le candidat n’apporte aucune justification particulière pour expliquer la méconnaissance des dispositions de l’article L. 52-12 du code électoral. Le juge prononce l’inéligibilité de l’intéressé pour une durée de trois années en raison de la particulière gravité des fautes ainsi constatées. L’analyse portera sur la caractérisation des violations des règles de financement avant d’envisager la portée de la sanction d’inéligibilité prononcée.
**I. La caractérisation des violations caractérisées des obligations de financement électoral**
**A. Le dépassement injustifié des délais impératifs de dépôt des comptes**
L’article L. 52-12 impose le dépôt du compte de campagne au plus tard le dixième vendredi suivant le premier tour du scrutin électoral. Le juge constate que le compte a été déposé avec un retard de près de deux mois sans invoquer de circonstances exceptionnelles. Cette exigence temporelle assure l’efficacité du contrôle exercé par l’autorité administrative sur la transparence financière des candidats aux fonctions électives. Le respect strict de ce calendrier constitue une condition nécessaire pour permettre le jugement des comptes dans les délais impartis par la loi.
**B. La méconnaissance de l’exigence de certification par un expert-comptable**
Le code électoral prévoit l’obligation de faire présenter le compte par un expert-comptable dès que les recettes ou les dépenses dépassent 4 000 euros. L’instruction révèle que le candidat a omis cette formalité substantielle malgré le franchissement manifeste des plafonds financiers fixés par le décret. La juridiction souligne que cette présentation garantit la mise en état d’examen du compte et la vérification préalable des pièces justificatives obligatoires. L’absence de recours à ce professionnel empêche le contrôle de la sincérité des opérations financières réalisées durant la période de la campagne.
**II. La rigueur de la sanction d’inéligibilité fondée sur la particulière gravité**
**A. L’appréciation de la gravité justifiant le prononcé de l’inéligibilité**
Le juge relève qu’il ne « résulte pas de l’instruction que des circonstances particulières étaient de nature à justifier la méconnaissance » des obligations légales. Le cumul d’un retard important et du défaut de certification comptable permet de caractériser un « manquement d’une particulière gravité » aux règles financières. La juridiction dispose d’un pouvoir d’appréciation souverain pour graduer la réponse juridictionnelle en fonction de la négligence ou de la fraude du candidat. Cette qualification juridique conditionne l’application de l’article L.O. 136-1 prévoyant la mise à l’écart du candidat de la vie politique nationale.
**B. La portée temporelle de l’inéligibilité au regard du droit électoral**
Le Conseil constitutionnel décide de prononcer l’inéligibilité pour une durée de trois ans à compter de la date de la présente décision. Cette mesure de police électorale vise à sanctionner la méconnaissance des principes de transparence et d’égalité devant les ressources de financement. La sanction frappe l’accès à tout mandat électif pour assurer la moralisation de la vie publique et le respect scrupuleux des règles comptables. La solution s’inscrit dans une jurisprudence constante protégeant la sincérité des scrutins contre les négligences graves affectant la comptabilité des dépenses.