Par une décision rendue le 8 juin 2023, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur le respect des obligations de financement des campagnes électorales. Un candidat ayant obtenu plus de un pour cent des suffrages exprimés devait déposer son compte de campagne au plus tard le 19 août 2022.
Ce dépôt n’est intervenu que le 14 octobre 2022, soit près de deux mois après l’expiration du délai légal imparti par le code électoral. L’autorité administrative de contrôle a saisi le juge après avoir constaté le dépassement manifeste de la date limite prévue par la loi.
La question consistait à déterminer si le dépôt tardif d’un compte impose une sanction d’inéligibilité malgré la croyance erronée du candidat sur ses obligations. Le Conseil a jugé que cette méprise n’est pas de nature à justifier la méconnaissance des règles législatives de la transparence financière. Il convient d’analyser le constat rigoureux du manquement aux délais légaux avant d’étudier la mise en œuvre de la sanction d’inéligibilité.
I. Le constat rigoureux du manquement aux délais légaux
A. L’exigence impérative d’un dépôt dans les délais prescrits
Le Conseil rappelle que tout candidat soumis au plafonnement est tenu d’établir un compte de campagne lorsqu’il obtient au moins un pour cent des voix. Ce document doit être déposé au plus tard avant dix-huit heures le dixième vendredi suivant le premier tour du scrutin selon les textes. La décision souligne que le compte retrace « l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l’élection ». La ponctualité de cette formalité constitue une garantie essentielle pour le contrôle efficace de la sincérité du scrutin par l’autorité compétente.
B. L’inefficacité des justifications fondées sur l’ignorance de la loi
Le candidat tentait de s’exonérer en expliquant qu’il pensait ne pas être tenu de déposer un compte en raison de son faible résultat électoral. Le juge rejette cet argument en affirmant que « cette circonstance n’est pas de nature à justifier la méconnaissance des obligations résultant de l’article L. 52-12 ». Nul n’est censé ignorer la loi électorale, particulièrement lorsqu’il sollicite le suffrage de ses concitoyens pour exercer un mandat de représentation nationale. La méconnaissance d’une règle de forme aussi claire entraîne inéluctablement une réaction ferme du juge pour protéger l’intégrité du financement politique.
II. La mise en œuvre d’une sanction de nature disciplinaire
A. Le fondement textuel de la déclaration d’inéligibilité
Pour prononcer sa décision, le Conseil constitutionnel s’appuie sur l’article L.O. 136-1 qui prévoit l’inéligibilité en cas de manquement d’une particulière gravité. Le juge peut déclarer inéligible le candidat qui n’a pas déposé son compte de campagne dans les « conditions et le délai prescrits à l’article L. 52-12 ». La sanction n’est pas automatique mais elle s’impose dès lors qu’aucun motif impérieux ou cas de force majeure ne vient expliquer la défaillance. Le juge exerce ici son rôle de régulateur en sanctionnant une négligence qui affecte directement la transparence comptable de la vie politique.
B. La portée de la sanction sur l’exercice futur des mandats
La décision frappe l’intéressé d’une inéligibilité à tout mandat pour une durée « d’un an à compter de la présente décision » conformément aux dispositions organiques. Cette mesure prive temporairement le citoyen du droit de se porter candidat, marquant ainsi la désapprobation de l’ordre juridique face au non-respect des règles. La portée de cet arrêt réside dans le rappel constant de la discipline budgétaire qui s’impose impérativement à tous les acteurs de la compétition électorale. Le respect des délais de dépôt demeure une condition de recevabilité incontournable pour assurer la probité du processus de désignation des parlementaires.