Le Conseil constitutionnel, par une décision du 29 juin 2023, s’est prononcé sur le respect des obligations comptables lors des élections législatives. Un candidat ayant obtenu plus de 1 % des suffrages exprimés a déposé son compte de campagne après le scrutin de juin 2022. L’organe administratif de contrôle a rendu une décision défavorable le 9 février 2023 avant de saisir le juge le 17 février suivant. Il a relevé l’absence de certification par un professionnel ainsi que l’omission de plusieurs dépenses électorales engagées par l’intéressé. Le candidat n’a produit aucune observation pour contester ces griefs ou justifier l’état de ses documents comptables transmis à l’administration. Le juge doit déterminer si le cumul de manquements formels et substantiels justifie une déclaration d’inéligibilité en application du code électoral. Le Conseil retient que le défaut de présentation professionnelle et l’absence de sincérité du compte imposent une sanction de trois ans. L’analyse portera sur la caractérisation des irrégularités constatées avant d’envisager les conséquences relatives à l’éligibilité du candidat à tout mandat.
I. La constatation objective de manquements aux impératifs de la comptabilité électorale
A. L’absence injustifiée de recours à l’expertise comptable pour la présentation du compte
Le code électoral impose aux candidats dont les mouvements financiers dépassent un certain seuil de faire certifier leurs comptes de campagne. Le Conseil rappelle que « ce compte doit être présenté par un membre de l’ordre des experts-comptables » pour garantir sa mise en examen. En l’espèce, le candidat a déclaré des recettes et des dépenses supérieures au montant de quatre mille euros fixé par les dispositions réglementaires. L’absence de recours à ce professionnel constitue une méconnaissance directe d’une formalité substantielle prévue par la loi pour assurer la transparence. Cette exigence permet d’authentifier les pièces justificatives produites et de vérifier l’équilibre réel des fonds utilisés durant la période électorale.
B. La méconnaissance de l’obligation de sincérité par l’omission de dépenses engagées
La sincérité du compte de campagne suppose l’inscription exhaustive de l’ensemble des frais engagés par le candidat pour sa promotion électorale. Les juges ont constaté qu’une somme de près de trois mille euros n’avait pas été intégrée dans le document comptable final. Le compte « ne comporte donc pas une description de la totalité des dépenses engagées » en vue de l’élection dans la circonscription. Un tel défaut d’exhaustivité empêche le contrôle effectif du plafonnement des dépenses et altère la véracité des informations transmises à l’autorité. La réunion de ces deux manquements objectifs conduit le juge à apprécier la gravité de la faute au regard du code électoral.
II. La sanction de l’inéligibilité comme corollaire de la gravité des irrégularités
A. L’appréciation souveraine du caractère substantiel des manquements aux obligations légales
Le juge constitutionnel dispose du pouvoir de déclarer inéligible tout candidat ayant gravement manqué aux règles de financement des campagnes électorales. Il souligne qu’il ne résulte pas de l’instruction que « des circonstances particulières étaient de nature à justifier la méconnaissance des obligations » légales. L’absence d’observations produites par le candidat durant la procédure contentieuse renforce le constat de la carence fautive sans justification extérieure. Le caractère délibéré ou la négligence manifeste dans la gestion des fonds de campagne autorise alors le juge à prononcer une sanction. Cette appréciation souveraine repose sur la nécessité de préserver l’égalité entre les compétiteurs devant le suffrage universel et la loi.
B. La portée temporelle de l’inéligibilité prononcée par la juridiction constitutionnelle
La décision de justice tire les conséquences de l’accumulation des fautes commises par le candidat lors du dépôt de ses comptes. Le Conseil prononce l’inéligibilité « eu égard au cumul d’irrégularités constatées et au caractère substantiel des obligations méconnues » par le justiciable. La durée de trois ans choisie par la juridiction marque une volonté de sanctionner rigoureusement des pratiques contraires à la probité publique. Cette solution s’inscrit dans une jurisprudence constante visant à exclure temporairement de la vie politique les individus ignorant les règles budgétaires. La protection de la sincérité des scrutins futurs dépend de l’application effective de ces mesures restrictives de liberté individuelle.