Conseil constitutionnel, Décision n° 2023-6270 AN du 8 décembre 2023

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 8 décembre 2023, une décision relative au contentieux électoral né des scrutins législatifs partiels organisés dans le Pas-de-Calais. Un candidat ayant obtenu plus de 1 % des suffrages exprimés se trouvait légalement contraint de déposer son compte de campagne auprès de l’autorité compétente. Le délai légal expirait impérativement le 31 mars 2023, mais l’intéressé n’a procédé à cette formalité que le 6 avril suivant. Saisie par la Commission nationale des comptes de campagne, la juridiction constitutionnelle devait déterminer si ce retard justifiait une déclaration d’inéligibilité. L’étude de la rigueur des délais imposés précédera l’examen de la sanction d’inéligibilité prononcée par les juges.

I. L’exigence impérieuse du respect des délais de dépôt des comptes

A. La rigueur du calendrier électoral en matière de financement L’article L. 52-12 du code électoral impose aux candidats une obligation de transparence financière stricte sous peine de sanctions affectant leur avenir politique. Le compte doit retracer « l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l’élection ». Le dépôt doit impérativement intervenir avant le dixième vendredi suivant le scrutin, marquant une limite temporelle franchissable sous aucun prétexte. Cette règle garantit l’égalité entre les compétiteurs et permet un contrôle efficace des flux financiers par l’administration dans des délais raisonnables.

B. L’inefficacité des justifications fondées sur l’erreur ou la gestion comptable Le candidat invoquait une erreur de calcul sur la date limite ainsi que l’attente de l’encaissement d’un chèque par son mandataire financier. Les juges considèrent que « ces circonstances ne sont pas de nature à justifier la méconnaissance des obligations résultant de l’article L. 52-12 ». La bonne foi alléguée ou les difficultés techniques ne sauraient donc constituer une cause d’exonération face à une obligation légale aussi claire. La décision souligne le caractère purement objectif du dépassement du délai, lequel suffit à caractériser l’irrégularité sans qu’une intention frauduleuse soit nécessaire.

II. La sanction de l’inéligibilité face aux manquements aux règles de financement

A. Le pouvoir d’appréciation du juge constitutionnel sur la gravité du manquement L’article L.O. 136-1 permet de déclarer inéligible le candidat n’ayant pas respecté les conditions de dépôt si le manquement présente une particulière gravité. Le retard de six jours, bien que relativement court, altère la sincérité du contrôle et constitue une violation substantielle des prescriptions du code électoral. Le Conseil constitutionnel exerce sa mission de gardien de la moralité publique en sanctionnant fermement les négligences affectant le processus de vérification financière. La jurisprudence confirme ainsi que le strict respect des délais demeure une pierre angulaire de la discipline imposée aux élus et aux prétendants.

B. La portée de la déclaration d’inéligibilité comme garantie de la probité électorale La juridiction prononce une inéligibilité d’une durée d’un an, écartant temporairement le candidat de toute compétition pour des mandats nationaux ou locaux. Cette sanction proportionnée vise à protéger l’ordre public électoral en dissuadant tout comportement laxiste dans la tenue des documents comptables de campagne. La décision du 8 décembre 2023 rappelle que la démocratie représentative exige une rigueur administrative absolue de la part de ceux qui aspirent à gouverner. L’inéligibilité constitue l’ultime rempart contre les manquements répétés ou graves qui pourraient nuire à la transparence nécessaire à l’expression du suffrage.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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