Le Conseil constitutionnel, par sa décision du 5 juin 2025, statue sur les obligations pesant sur les candidats lors du financement de leur campagne électorale. Une candidate ayant participé aux élections législatives de juin et juillet 2024 a omis de faire ouvrir un compte bancaire par son mandataire financier attitré. Le 25 novembre 2024, l’autorité administrative compétente a prononcé le rejet de son compte pour méconnaissance grave des prescriptions légales applicables au financement. Le juge constitutionnel, saisi de cette situation, doit alors examiner si l’absence de traçabilité des opérations financières justifie une mesure de privation du droit d’éligibilité. Le Conseil valide d’abord le constat d’irrégularité comptable avant de caractériser la gravité du manquement pour prononcer une sanction d’inéligibilité d’une durée de douze mois.
I. L’exigence impérative de traçabilité bancaire des fonds électoraux
A. Le caractère obligatoire de l’ouverture d’un compte unique
L’article L. 52-6 du code électoral impose au « mandataire financier d’ouvrir un compte bancaire ou postal unique retraçant la totalité de ses opérations financières ». Cette règle de centralisation des flux financiers permet au juge et à l’administration de s’assurer de la réalité ainsi que de la régularité des dépenses. L’ouverture d’un compte spécifique constitue une garantie fondamentale pour la transparence électorale, interdisant toute confusion entre les fonds personnels et les moyens dédiés au scrutin.
B. Le rejet de plein droit du compte de campagne irrégulier
Le Conseil constitutionnel relève que l’absence d’ouverture de compte bancaire est formellement constatée, entraînant le rejet immédiat du compte déposé par la candidate concernée. Les juges précisent que « cette circonstance est établie », confirmant ainsi le bien-fondé de la décision prise antérieurement par l’autorité nationale de contrôle financier. Dès lors, la méconnaissance de cette formalité substantielle prive l’administration de son pouvoir de vérification, ce qui rend le compte de campagne intrinsèquement insusceptible d’être validé.
II. La sanction de l’inéligibilité face à un manquement caractérisé
A. L’insuffisance des justifications liées aux contraintes matérielles
Pour justifier l’omission, la défense invoquait des obstacles matériels liés aux « congés estivaux de son agence bancaire » ayant prétendument empêché l’ouverture du compte. La juridiction constitutionnelle rejette fermement cette explication en indiquant que ces difficultés ne sont pas de nature à « justifier la méconnaissance des obligations » légales. La responsabilité du candidat demeure entière quant au respect du calendrier électoral, lequel exige une anticipation suffisante pour pallier les aléas administratifs ou bancaires courants.
B. La proportionnalité d’une peine d’inéligibilité d’un an
Le code électoral dispose qu’un « manquement d’une particulière gravité » permet au Conseil de déclarer inéligible le candidat dont le compte a été valablement rejeté. L’absence de compte bancaire unique est qualifiée par le juge de faute grave, car elle porte une atteinte directe à la sincérité du contrôle financier. En conséquence, la décision prononce une inéligibilité d’un an, rappelant la fonction préventive de cette sanction contre les atteintes à la probité des élections législatives.