Le Conseil constitutionnel, par sa décision n° 2025-6436 AN du 20 juin 2025, statue sur l’inéligibilité d’un candidat n’ayant pas déposé son compte de campagne. Ce litige concerne l’obligation de transparence financière imposée à tout citoyen briguant un mandat national lors des élections législatives de l’été 2024. Le candidat a obtenu plus de un pour cent des suffrages exprimés, ce qui le soumettait impérativement aux règles de l’article L. 52-12 du code électoral. La Commission nationale des comptes de campagne a constaté l’absence de dépôt et a saisi la juridiction constitutionnelle le 22 janvier 2025. L’intéressé invoque des difficultés bancaires rencontrées par son mandataire ainsi qu’un financement personnel des dépenses pour justifier son manquement aux obligations légales. Le juge doit déterminer si ces circonstances particulières suffisent à écarter la qualification de manquement d’une particulière gravité justifiant une mesure d’inéligibilité. Le Conseil constitutionnel rejette cette argumentation et prononce une interdiction de se présenter à tout scrutin pour une durée de trois années consécutives.
I. La caractérisation d’un manquement grave aux obligations de financement
A. L’obligation légale de dépôt du compte de campagne Le juge rappelle d’abord que « chaque candidat aux élections législatives soumis au plafonnement […] est tenu d’établir un compte de campagne » selon des critères précis. Cette obligation s’applique dès lors que le candidat franchit le seuil de un pour cent des voix ou reçoit des dons de personnes physiques. Le document doit retracer l’intégralité des recettes et des dépenses engagées pour l’élection, tout en respectant une condition stricte d’équilibre ou d’excédent. Le dépôt doit intervenir impérativement avant le dixième vendredi suivant le scrutin auprès de l’autorité administrative compétente sous peine de sanctions sévères et automatiques.
B. L’inefficacité des moyens de défense invoqués Le candidat tentait de justifier son omission par les difficultés de son mandataire financier à ouvrir un compte de dépôt auprès d’un établissement bancaire. Le Conseil constitutionnel relève toutefois qu’il ne résulte pas de l’instruction que ces faits « étaient de nature à justifier la méconnaissance des obligations ». L’argument tiré du règlement des frais sur fonds propres ne permet pas d’écarter la responsabilité du candidat quant à la transparence de ses comptes. Le juge électoral maintient ainsi une interprétation rigoureuse des textes, refusant d’admettre des circonstances atténuantes fondées sur de simples obstacles logistiques non insurmontables.
II. La sanction rigoureuse de l’opacité financière
A. La reconnaissance d’un manquement d’une particulière gravité L’article L.O. 136-1 prévoit que le Conseil peut déclarer inéligible le candidat en cas de « volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité ». Le défaut total de dépôt du compte de campagne prive l’administration de tout contrôle réel sur les flux financiers durant la période électorale. Une telle omission est systématiquement qualifiée de grave par la jurisprudence constitutionnelle, car elle porte atteinte à l’égalité fondamentale entre les différents candidats. La décision souligne ici que le non-respect délibéré des délais prescrits par le code électoral caractérise un manquement objectif à la probité républicaine.
B. Le prononcé d’une inéligibilité de trois ans Face à la méconnaissance des règles précitées, le Conseil déclare le candidat « inéligible à tout mandat pour une durée de trois ans à compter de la présente décision ». Cette sanction maximale reflète la volonté du juge de préserver l’intégrité des processus électifs et de dissuader toute tentative de dissimulation financière. La portée de cet arrêt confirme la sévérité du juge constitutionnel envers les candidats négligents, même en l’absence de fraude électorale dûment démontrée. La transparence des financements demeure donc la pierre angulaire de la sincérité du scrutin législatif, imposant une rigueur absolue à chaque participant.