Le Conseil constitutionnel, par une décision n° 2025-6439 AN rendue le 20 juin 2025, a statué sur la régularité du financement d’une campagne électorale. Un candidat ayant participé au scrutin de juin et juillet 2024 a franchi le seuil des cinq pour cent des suffrages exprimés. Les dépenses et les recettes retracées dans son document comptable excédaient le montant forfaitaire de quatre mille euros fixé par voie réglementaire. L’autorité de régulation des comptes de campagne a saisi le juge électoral le 23 janvier 2025 après sa décision du 13 janvier précédent. Le candidat a produit des observations le 8 février 2025 pour tenter de justifier l’absence de certification professionnelle de ses documents financiers. Il s’agissait de savoir si le défaut de présentation du compte par un expert-comptable constitue une violation grave des règles du code électoral. La juridiction a considéré que cette omission caractérise un « manquement d’une particulière gravité » justifiant une déclaration d’inéligibilité immédiate de l’intéressé. L’examen de la caractérisation du manquement comptable précède naturellement l’étude de la sanction de l’inéligibilité retenue par la juridiction.
I. La caractérisation d’un manquement aux obligations de présentation comptable
A. Le caractère obligatoire de l’intervention d’un expert-comptable
L’article L. 52-12 dispose que le compte de campagne doit être présenté par un membre de l’ordre des experts-comptables. Ce professionnel « met le compte en état d’examen et s’assure de la présence des pièces justificatives » nécessaires au contrôle financier. Cette obligation s’impose dès lors que le candidat obtient cinq pour cent des voix ou dépasse un certain niveau de dépenses. En l’espèce, le candidat remplissait ces deux critères cumulatifs mais n’a pas sollicité l’intervention d’un spécialiste agréé pour valider ses comptes. La loi électorale cherche ainsi à garantir la sincérité des déclarations financières pour préserver l’égalité de traitement entre tous les candidats.
B. L’absence de justification de la méconnaissance des règles de financement
Le Conseil constitutionnel examine systématiquement si des motifs impérieux permettent de pardonner une erreur commise lors de l’établissement du dossier financier. La juridiction relève qu’il « ne résulte pas de l’instruction que des circonstances particulières étaient de nature à justifier la méconnaissance » des règles. Le candidat n’a pas démontré l’existence d’un obstacle insurmontable l’ayant empêché de respecter les prescriptions légales relatives à la présentation du compte. L’irrégularité ainsi établie conduit la juridiction à s’interroger sur les conséquences juridiques attachées à une telle omission de nature comptable.
II. La sanction de l’inéligibilité au regard de la gravité du manquement
A. L’appréciation souveraine de la particulière gravité par le juge électoral
L’article L.O. 136-1 permet au juge de prononcer l’inéligibilité en cas de manquement d’une particulière gravité aux règles de financement électoral. Le Conseil constitutionnel exerce un contrôle souverain sur la qualification de cette gravité pour assurer la crédibilité du processus démocratique national. Il estime ici que le défaut de certification par un expert-comptable altère fondamentalement la procédure de vérification des dépenses engagées. Cette exigence de forme est considérée comme un pilier de la transparence financière dont le non-respect volontaire ne saurait rester impuni.
B. La portée d’une sanction proportionnée à la méconnaissance du code électoral
Le juge électoral déclare le candidat inéligible pour une durée d’un an, marquant ainsi une volonté de sanctionner fermement les dérives comptables. Cette mesure de police électorale vise à écarter temporairement de la compétition politique les citoyens ayant ignoré les règles de transparence financière. La portée de cet arrêt confirme la rigueur constante du Conseil constitutionnel envers les manquements liés à l’intervention obligatoire des experts-comptables. La protection de la sincérité du scrutin législatif justifie cette restriction temporaire au droit de se porter candidat devant le suffrage universel.