Conseil constitutionnel, Décision n° 2025-6490 AN du 20 juin 2025

Une candidate aux élections législatives des 30 juin et 7 juillet 2024 dans un département de la région parisienne a méconnu ses obligations de financement. La commission nationale compétente a rendu une décision de rejet de son compte de campagne le 3 février 2025 pour violation des règles comptables. Cette autorité a constaté l’absence de compte bancaire unique ouvert par le mandataire financier pour retracer l’ensemble des opérations financières liées à l’élection. Dès lors, la juridiction constitutionnelle a été saisie le 10 février 2025 afin de statuer sur les conséquences juridiques de cette irrégularité comptable manifeste. La question posée consistait à déterminer si le défaut d’ouverture d’un compte bancaire constituait un manquement d’une particulière gravité justifiant une mesure d’inéligibilité. Dans sa décision du 20 juin 2025, le Conseil constitutionnel valide le rejet du compte et prononce une inéligibilité d’une durée d’une année. L’examen de cette décision permet d’analyser l’irrégularité substantielle du financement avant d’étudier la portée de la sanction d’inéligibilité retenue par le juge.

I. La constatation d’une méconnaissance substantielle des obligations de financement électoral A. Le caractère impératif de l’ouverture d’un compte bancaire par le mandataire L’article L. 52-6 du code électoral impose au mandataire financier d’ouvrir un compte bancaire ou postal unique retraçant la totalité des opérations financières de campagne. En effet, cette obligation constitue la pierre angulaire du contrôle exercé sur les dépenses afin de garantir la transparence et la sincérité du scrutin. La juridiction constitutionnelle relève que le compte a été rejeté « au motif que son mandataire financier n’avait pas ouvert de compte bancaire ». L’existence de ce compte unique permet d’isoler les fonds de campagne et d’éviter toute confusion avec le patrimoine personnel de la candidate concernée. Le respect de ce formalisme assure que chaque flux financier puisse être contrôlé efficacement par l’autorité de régulation lors de son examen approfondi. L’omission de cette formalité entraîne irrémédiablement le rejet du compte déposé devant l’organisme chargé de la vérification des comptes de campagne électorale.

B. La confirmation jurisprudentielle du rejet du compte de campagne La juridiction valide l’appréciation de la commission en affirmant que « cette circonstance est établie » après l’examen des pièces versées au dossier de procédure. En l’absence de compte bancaire, les relevés nécessaires à la vérification de l’origine et de la nature des fonds engagés font totalement défaut. Dès lors, la décision précise que « c’est à bon droit que la commission nationale compétente a rejeté son compte de campagne » pour cette session. Cette solution s’inscrit dans une jurisprudence constante sanctionnant la méconnaissance des règles relatives au compte bancaire unique du mandataire financier des candidats. Le rejet constitue la conséquence automatique d’une violation directe des dispositions législatives encadrant strictement les modalités de financement de la vie politique. Une telle irrégularité formelle et substantielle ouvre alors la voie à une appréciation de la responsabilité personnelle de la candidate au scrutin législatif.

II. La répression proportionnée d’un manquement jugé d’une particulière gravité A. L’appréciation de la gravité de la faute au regard du droit positif Le juge se fonde sur l’article L.O. 136-1 pour sanctionner un « manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales » nationales. L’absence de toute opération via un compte bancaire dédié empêche tout contrôle réel de la circulation des capitaux durant la période de campagne. La juridiction souligne la « particulière gravité du manquement à une règle dont [la candidate] ne pouvait ignorer la portée » lors de son engagement. En effet, cette sévérité se justifie par la nécessité de prévenir toute tentative de dissimulation de ressources ou de dépassement des plafonds légaux autorisés. La méconnaissance d’une règle aussi fondamentale du droit électoral ne saurait être regardée comme une simple erreur matérielle ou une omission négligeable. L’appréciation souveraine de cette gravité conduit ainsi le juge à prononcer une sanction limitant l’exercice futur du droit de se porter candidat.

B. La portée de la déclaration d’inéligibilité sur la vie politique de la candidate La décision du Conseil constitutionnel du 20 juin 2025 déclare la candidate inéligible pour une durée d’un an à compter de ce jour. Cette mesure de police électorale vise à assurer l’égalité entre les prétendants aux suffrages et à moraliser les pratiques de financement des campagnes. Toutefois, le juge proportionne la durée de l’inéligibilité à la nature de la faute commise sans pour autant appliquer le maximum légalement envisageable. La solution retenue réaffirme que la transparence financière constitue une condition indispensable à la validité de l’expression du suffrage universel dans une démocratie. Elle rappelle également aux futurs candidats l’importance capitale de s’entourer d’un mandataire financier respectueux de l’ensemble des formalités prévues par le législateur. La rigueur manifestée par la juridiction contribue à renforcer la confiance des citoyens envers les institutions représentatives et l’intégrité des processus électoraux nationaux.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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