Conseil constitutionnel, Décision n° 2025-6497 AN du 20 juin 2025

Le Conseil constitutionnel, par une décision du 20 juin 2025, se prononce sur le respect des règles de financement des campagnes électorales. Une candidate aux élections législatives de juin et juillet 2024 n’a pas veillé à l’ouverture d’un compte bancaire spécifique par son mandataire. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de l’intéressée le 10 février 2025. Le juge constitutionnel a été saisi deux jours plus tard pour statuer sur l’éventuelle inéligibilité de cette candidate. La question posée au Conseil porte sur la qualification de la gravité de l’omission d’ouverture d’un compte bancaire unique. Le Conseil affirme que ce manquement justifie le rejet du compte et prononce une inéligibilité d’une durée d’un an. La rigueur du contrôle de la traçabilité financière précède l’appréciation souveraine de la gravité du manquement commis par le candidat.

I. La rigueur du contrôle de la traçabilité financière des fonds électoraux

A. Le caractère substantiel de l’obligation d’ouverture d’un compte unique

L’article L. 52-6 du code électoral prévoit que le mandataire doit ouvrir un compte bancaire unique pour l’ensemble des opérations financières du candidat. Cette obligation permet d’assurer la transparence des fonds et d’éviter tout mélange entre les deniers personnels et les dépenses de la campagne. Le Conseil constitutionnel rappelle que ce texte « impose au mandataire financier d’ouvrir un compte bancaire ou postal unique retraçant la totalité de ses opérations financières ». L’absence d’un tel compte empêche tout contrôle réel de la part de l’administration et constitue une violation substantielle des règles de financement.

L’exigence d’un support bancaire unique constitue ainsi le pilier central du dispositif de transparence financière entourant les opérations électorales. Cette formalité impérative entraîne des conséquences automatiques sur la validité du compte déposé par le candidat devant la commission nationale compétente.

B. La validation juridictionnelle automatique du rejet du compte de campagne

La juridiction estime que « c’est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté son compte de campagne ». L’absence d’ouverture d’un compte bancaire constitue une irrégularité majeure qui ne peut être régularisée après l’expiration des délais légaux de dépôt. Le juge constate simplement l’omission matérielle de la candidate sans avoir à rechercher une intention de dissimuler des recettes ou des dépenses. Cette solution protège l’égalité entre les candidats en imposant à chacun les mêmes contraintes de présentation de leurs documents comptables officiels.

Le juge valide la sanction administrative du rejet dès lors que l’absence de compte bancaire spécifique est matériellement constatée par les pièces du dossier. Cette irrégularité formelle invite ensuite le Conseil constitutionnel à s’interroger sur la nécessité de prononcer une peine d’inéligibilité contre l’intéressée.

II. L’appréciation de la gravité du manquement et la sanction d’inéligibilité

A. La présomption de connaissance de la portée des règles de financement

L’article L.O. 136-1 permet au juge de déclarer inéligible le candidat en cas de manquement d’une particulière gravité aux règles de financement. Le Conseil souligne ici la « particulière gravité du manquement à une règle dont [la candidate] ne pouvait ignorer la portée » réelle. La méconnaissance d’une formalité aussi élémentaire que l’ouverture d’un compte bancaire de campagne est rarement excusée par le juge de l’élection. Cette sévérité repose sur la présomption que tout candidat aux fonctions législatives doit maîtriser les obligations légales essentielles de sa propre campagne.

La méconnaissance d’une règle fondamentale dont la candidate ne pouvait ignorer la portée justifie alors l’application des dispositions organiques relatives à l’inéligibilité. Il convient toutefois d’étudier la mesure de cette sanction au regard du délai d’un an retenu par les juges de la rue de Montpensier.

B. La modulation temporelle de la sanction d’inéligibilité

La sanction d’inéligibilité pour une durée d’un an reflète la volonté du juge de réprimer sévèrement les atteintes à la clarté financière. Cette décision prive la candidate de la possibilité de se présenter à tout nouveau scrutin pendant la période fixée par le Conseil constitutionnel. Le délai d’un an demeure une sanction classique pour un défaut d’ouverture de compte lorsque aucune volonté de fraude manifeste n’est démontrée. Le Conseil assure ainsi une fonction pédagogique en rappelant aux futurs candidats l’importance capitale de la désignation d’un mandataire financier diligent.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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