Le Conseil constitutionnel, par sa décision du 20 juin 2025, statue sur le respect des règles de financement lors des élections législatives de juin et juillet 2024. Un candidat à la députation dans la deuxième circonscription des Côtes-d’Armor a souscrit des emprunts dépassant largement les limites autorisées par le code électoral. La Commission nationale des comptes de campagne a rejeté son compte le 10 février 2025 avant de saisir le juge de l’élection conformément aux dispositions légales. La question posée au juge est de savoir si le dépassement substantiel du plafond des prêts personnels constitue un manquement justifiant une déclaration d’inéligibilité. Le Conseil constitutionnel confirme le rejet du compte et prononce une inéligibilité d’un an à l’encontre de l’intéressé compte tenu de la gravité des faits.
I. L’encadrement rigoureux des emprunts auprès des personnes physiques
A. La fixation d’un plafond de financement spécifique
Le code électoral impose aux candidats une discipline budgétaire stricte afin de garantir l’égalité entre les différents prétendants au mandat parlementaire. L’article L. 52-12 dispose que « chaque candidat aux élections législatives soumis au plafonnement […] est tenu d’établir un compte de campagne » retraçant ses dépenses. Cette obligation comptable permet une vérification ultérieure par l’autorité administrative pour s’assurer de la provenance et de la licéité des fonds utilisés en période électorale.
Le législateur a particulièrement encadré les modalités d’emprunt auprès des citoyens pour éviter tout financement occulte ou disproportionné au bénéfice d’une seule candidature. Les textes précisent que « le montant total dû par le candidat soit inférieur ou égal au plafond de remboursement forfaitaire des dépenses de campagne » mentionné à la loi. Cette règle limite ainsi le recours au crédit privé à hauteur de quarante-sept virgule cinq pour cent du plafond global des dépenses autorisées.
B. Le constat objectif du dépassement des seuils légaux
Dans cette affaire, les comptes produits par le candidat font état de recettes issues d’emprunts auprès de personnes physiques pour un montant total de 45 600 euros. Or, le plafond de remboursement forfaitaire applicable dans la circonscription concernée s’élevait seulement à la somme précise de 34 249 euros pour cette élection. L’excédent constaté par le juge électoral dépasse donc les dix mille euros, ce qui représente une violation caractérisée des limites fixées par le pouvoir réglementaire.
La matérialité de cette irrégularité comptable est établie par les pièces du dossier transmises par la commission nationale et n’est contestée par aucune observation de l’intéressé. Le Conseil constitutionnel relève que ces circonstances sont avérées, ce qui entraîne automatiquement l’application des sanctions prévues par les dispositions législatives relatives au financement électoral. Le respect de ces plafonds constitue une garantie essentielle de la sincérité du scrutin et de l’équilibre financier entre les différents candidats en présence.
II. La sanction d’un manquement d’une particulière gravité
A. Le rejet justifié du compte par la Commission nationale
La décision attaquée repose sur une application littérale des textes puisque le compte présentait des ressources irrégulières affectant directement l’équilibre général de la campagne menée. Le Conseil constitutionnel affirme que « c’est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne » litigieux. Ce rejet administratif constitue le préalable nécessaire au prononcé d’une sanction plus lourde affectant la capacité du candidat à se présenter à de futurs scrutins.
L’absence d’observations produites par le candidat pour justifier ce dépassement renforce la position des juges quant au caractère inexcusable de la méconnaissance des règles élémentaires de financement. Le juge se borne ici à constater la méconnaissance d’une règle arithmétique dont le non-respect altère la transparence financière exigée de tout futur représentant de la nation. La rigueur du contrôle exercé par la commission administrative est ainsi validée par le juge de l’élection qui assure l’effectivité des sanctions pécuniaires et politiques.
B. Le prononcé de l’inéligibilité par le juge électoral
Le code électoral permet au Conseil constitutionnel de déclarer l’inéligibilité d’un candidat en cas de « volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité » aux règles établies. En l’espèce, le montant du dépassement par rapport au plafond autorisé suffit à caractériser une faute d’une gravité telle qu’elle justifie une mesure d’exclusion temporaire. Le juge considère que l’ampleur de l’irrégularité portant sur les emprunts privés ne permet pas de retenir la bonne foi ou une simple erreur matérielle.
La sanction est fixée à une durée d’un an à compter de la date de la décision, interdisant ainsi au candidat de briguer tout nouveau mandat. Cette mesure de police électorale vise à protéger l’ordre public et à dissuader les futures violations des règles de financement des campagnes pour la représentation nationale. La décision s’inscrit dans une jurisprudence constante qui sanctionne sévèrement les dépassements de plafonds de recettes dès lors qu’ils présentent un caractère substantiel et délibéré.