Conseil constitutionnel, Décision n° 2025-6512 AN du 6 juin 2025

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 6 juin 2025, une décision relative au contrôle des comptes de campagne lors des élections législatives de juin et juillet 2024. Une candidate s’était présentée au scrutin dans une circonscription départementale sans toutefois respecter l’intégralité des obligations comptables imposées par le code électoral. En l’espèce, le mandataire financier désigné par la requérante n’avait procédé à l’ouverture d’aucun compte bancaire ou postal spécifique pour retracer les opérations financières. Saisie par la commission nationale compétente, la juridiction devait déterminer si ce manquement justifiait le rejet du compte et une déclaration d’inéligibilité. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques avait préalablement rejeté le compte le 13 février 2025 pour violation de l’article L. 52-6. Le juge constitutionnel s’est trouvé confronté à la question de savoir si l’absence de compte bancaire dédié constituait un manquement d’une particulière gravité. La décision confirme la validité du rejet et prononce une inéligibilité d’un an en raison de la portée fondamentale de cette règle de transparence.

I. La confirmation du rejet pour méconnaissance des obligations bancaires

A. L’obligation impérative d’ouverture d’un compte unique

Le juge rappelle que « le mandataire financier doit ouvrir un compte bancaire ou postal unique retraçant la totalité de ses opérations financières » selon le code. Cette exigence garantit la sincérité des recettes et des dépenses engagées pendant la période électorale pour assurer l’égalité effective entre tous les candidats déclarés. L’absence totale de compte bancaire prive ainsi la commission de tout moyen de contrôle fiable sur l’origine et la nature des fonds utilisés. Cette omission constitue une violation directe des dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 52-6 dont la clarté ne laisse aucune place à l’interprétation.

B. La sanction automatique du défaut de traçabilité financière

Le Conseil constitutionnel estime que « c’est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté » le document. Le rejet comptable découle ici d’une constatation matérielle objective qui rend impossible la vérification des pièces justificatives normalement présentées par un expert-comptable ou le candidat. Cette solution s’inscrit dans une jurisprudence constante visant à protéger l’ordre public électoral contre les risques de financements occultes ou non déclarés par les mandataires. La sanction du rejet est la conséquence directe de l’impossibilité technique de mettre le compte en état d’examen faute d’un support bancaire unique.

II. La proportionnalité de la sanction d’inéligibilité

A. La caractérisation d’un manquement d’une particulière gravité

L’article L.O. 136-1 permet de déclarer l’inéligibilité en cas de « manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales » constaté par le juge. Le Conseil relève ici que la candidate « ne pouvait ignorer la portée » d’une règle aussi élémentaire et structurante pour l’équilibre financier de sa propre campagne. La gravité ne réside pas seulement dans l’absence de traçabilité mais dans la négligence manifeste d’une obligation légale connue de tout citoyen se portant candidat. Cette appréciation rigoureuse renforce l’autorité des normes électorales et souligne l’importance de la vigilance attendue de la part des prétendants à une fonction législative.

B. La portée temporelle limitée de l’interdiction de se présenter

Le juge constitutionnel prononce une inéligibilité à tout mandat pour une durée d’un an à compter de la présente décision après avoir établi le manquement. Cette durée de douze mois apparaît mesurée au regard du plafond maximal de trois ans prévu par les dispositions législatives organiques pour les fautes lourdes. Le Conseil concilie ainsi la nécessité de sanctionner une méconnaissance grave de la loi avec le respect du droit de suffrage et le principe de proportionnalité. Cette décision confirme que le respect des formalités bancaires demeure une condition sine qua non pour la validité d’une candidature aux élections législatives sur le territoire.

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Hassan KOHEN
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