Conseil constitutionnel, Décision n° 2025-6515 AN du 20 juin 2025

Par une décision n° 2025-6515 AN rendue le 20 juin 2025, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur le respect des règles de financement lors des élections législatives de 2024. Une candidate ayant recueilli plus d’un pour cent des suffrages exprimés devait déposer son compte de campagne avant le 6 septembre 2024. Ce document ne fut cependant enregistré auprès de la commission nationale compétente que le 9 septembre suivant. Saisi par ladite commission le 19 février 2025, le juge électoral doit déterminer si ce retard constitue un manquement justifiant une déclaration d’inéligibilité. Les magistrats constatent la méconnaissance du délai légal et prononcent une sanction d’un an en raison de la gravité de l’omission. La rigueur de cette solution repose sur l’examen du respect des formes avant d’envisager la sévérité de la mesure de police électorale retenue.

I. La caractérisation du défaut de dépôt du compte de campagne

A. Le caractère contraignant du délai de forclusion électoral

Le juge rappelle que « chaque candidat aux élections législatives soumis au plafonnement […] est tenu d’établir un compte de campagne » sous des conditions strictes de délai. Cette obligation pèse sur tout compétiteur ayant obtenu au moins un pour cent des suffrages exprimés ou bénéficié de dons de personnes physiques. Le texte précise que le dépôt doit s’effectuer « au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin ». En l’espèce, le terme de cette période était fixé au 6 septembre 2024 pour un scrutin s’étant déroulé au début de l’été. La production tardive du compte le 9 septembre constitue ainsi une violation directe de la règle fixée par l’article L. 52-12 du code électoral. Cette formalité garantit la transparence du financement de la vie politique par un contrôle effectif des ressources et des dépenses engagées.

B. L’inexistence de motifs légitimes pour justifier le retard

Le Conseil constitutionnel observe qu’aucune cause extérieure n’est venue expliquer la transmission hors délai du document comptable par la candidate concernée. La décision souligne qu’ « il ne résulte pas de l’instruction que des circonstances particulières étaient de nature à justifier la méconnaissance des obligations » précitées. Les magistrats refusent d’accueillir des excuses purement formelles ou des négligences administratives pour écarter l’application de la loi. Une telle exigence de preuve renforce la portée de la procédure de contrôle tout en limitant le pouvoir d’appréciation subjective du juge électoral. Le non-respect d’un calendrier précis compromet l’égalité entre les candidats et la sincérité du contrôle exercé par la commission nationale. L’absence de justification transforme alors cette simple omission temporelle en un manquement passible d’une sanction à caractère personnel.

II. La sanction de la particulière gravité du manquement constaté

A. Le fondement textuel du prononcé de l’inéligibilité

L’article L.O. 136-1 permet au juge de déclarer l’inéligibilité « en cas de volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité aux règles de financement ». Cette disposition organique offre au Conseil constitutionnel le moyen de réprimer les comportements affectant la probité des opérations électorales. La jurisprudence utilise cette qualification pour les retards qui, par leur nature, font obstacle à la mission de vérification dévolue à l’autorité administrative. La méconnaissance du délai de dépôt est ici assimilée à une faute sérieuse privant les organes de contrôle de leur capacité d’action immédiate. La décision précise expressément que c’est « compte tenu de la particulière gravité de ce manquement » que l’inéligibilité doit être désormais prononcée. Le juge manifeste ainsi sa volonté de maintenir une discipline stricte autour du financement des campagnes pour assurer l’équilibre du débat démocratique.

B. La mesure de l’inéligibilité comme outil de régulation électoral

La durée de l’inéligibilité est fixée à une année entière à compter de la date de notification de la décision aux parties intéressées. Cette sanction temporaire interdit à la personne visée de briguer tout mandat électif durant la période définie par les membres du Conseil constitutionnel. Une telle fermeté illustre la fonction préventive du contentieux électoral qui cherche à dissuader les candidats de négliger leurs devoirs comptables. La décision sera publiée au Journal officiel de la République française conformément aux modalités prévues par le règlement de procédure applicable devant la juridiction. Ce dispositif assure une publicité large de la sanction afin de garantir l’efficacité de l’interdiction de se présenter devant les électeurs. Le respect scrupuleux des calendriers financiers demeure donc la condition essentielle pour conserver la capacité juridique de participer à la vie publique nationale.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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