Le Conseil constitutionnel a rendu, le 24 avril 2025, une décision marquante concernant la loi relative au renforcement de la sûreté dans les transports. Des membres du Parlement ont saisi la juridiction afin d’examiner la conformité de nombreuses dispositions étendant les prérogatives des services de sécurité internes. Ces textes visaient à renforcer les contrôles et à généraliser l’usage de dispositifs de captation audiovisuelle pour prévenir les atteintes à l’ordre public. Le juge devait déterminer si l’extension de pouvoirs de police à des agents privés respectait la garantie des droits constitutionnels fondamentaux. La juridiction a validé l’essentiel du texte sous réserves d’interprétation, tout en censurant les délégations excessives de la force publique. L’encadrement des nouvelles mesures de sûreté précède l’étude de la protection rigoureuse du monopole étatique de la contrainte.
I. L’encadrement des nouvelles mesures de sûreté
A. Une extension validée des pouvoirs de contrôle
Le législateur a autorisé les agents de sécurité internes à procéder à des palpations et des inspections de bagages sans arrêté préfectoral préalable. Le Conseil juge ces « prérogatives de portée limitée » proportionnées car elles s’exercent uniquement dans les emprises immobilières nécessaires à l’exploitation des réseaux. Ces interventions visent l’objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l’ordre public sans méconnaître les garanties fondamentales des citoyens. La juridiction précise que les agents ne disposent pas de ces pouvoirs lorsqu’ils exercent exceptionnellement leurs missions sur la voie publique environnante. Cette limitation géographique stricte assure que les agents privés n’exercent pas une mission de surveillance générale de l’espace public urbain.
B. La préservation nécessaire des libertés individuelles
L’usage de caméras individuelles et de systèmes de captation sonore est déclaré conforme car il poursuit une finalité de prévention des incidents. Le Conseil souligne que « l’enregistrement ne peut avoir lieu sur la voie publique » et reste soumis à des garanties techniques protectrices. Le droit au respect de la vie privée impose cependant une réserve d’interprétation concernant les caméras frontales des transports guidés urbains. Celles-ci ne sauraient permettre la captation d’images « au-delà des seuls abords immédiats des véhicules » pour éviter toute surveillance de masse injustifiée. La protection du droit de propriété est également maintenue s’agissant de la conservation temporaire d’objets dangereux avec le consentement exprès des personnes.
II. La protection rigoureuse du monopole de la force publique
A. La censure des délégations inconstitutionnelles de contrainte
La décision sanctionne fermement la possibilité pour des agents privés d’exercer une mesure de contrainte physique sur les usagers refusant d’obtempérer. Une telle prérogative « relève, par nature, de la seule compétence des autorités de police » et ne peut être confiée à des particuliers. L’article 12 de la Déclaration de 1789 interdit de « déléguer à des personnes privées des compétences de police administrative générale » inhérentes à la force publique. Le juge censure ainsi l’extension de ce pouvoir de coercition qui permettait aux agents de contraindre une personne à descendre d’un véhicule. La surveillance de la voie publique par des opérateurs privés dans certains territoires est également rejetée car elle constitue une délégation prohibée.
B. La sanction des irrégularités de la procédure législative
Plusieurs articles sont déclarés contraires à la Constitution en raison de leur absence de lien avec le texte initial déposé au Parlement. Ces dispositions introduites tardivement concernent notamment le port du pistolet à impulsion électrique et la prorogation des traitements algorithmiques d’images de vidéoprotection. Le Conseil constitutionnel veille ainsi au respect scrupuleux de l’article 45 de la Constitution pour garantir la sincérité du débat législatif. Ces censures procédurales ne préjugent pas de la conformité matérielle des mesures mais sanctionnent la méthode d’introduction des amendements en première lecture. La décision réaffirme la nécessité d’un débat parlementaire structuré autour de l’objet initial de la proposition de loi déposée.