Conseil constitutionnel, Décision n° 2025-886 DC du 19 juin 2025

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 19 juin 2025, la décision n° 2025-886 DC portant sur la loi visant à renforcer l’autorité de la justice. Saisi par plusieurs parlementaires, le juge constitutionnel devait examiner la conformité de dispositions durcissant le régime pénal applicable aux mineurs et à leurs parents. Les requérants soutenaient que le texte méconnaissait le principe de responsabilité personnelle et le principe fondamental reconnu par les lois de la République. Ce principe constitutionnel impose la primauté de l’éducation sur la répression ainsi qu’une justice spécialisée adaptée à l’âge des enfants délinquants. Le litige opposait la volonté législative de fermeté pénale aux garanties spécifiques protégeant l’enfance depuis l’ordonnance de 1945. Le Conseil valide la responsabilité des parents pour les fautes de leurs enfants mais censure les procédures de jugement rapide. Cette décision souligne l’équilibre nécessaire entre la sauvegarde de l’ordre public et la préservation de la spécificité de la justice des mineurs.

I. L’admission d’une sévérité accrue envers les parents et l’encadrement des libertés

A. La validation de la responsabilité pénale pour défaillance éducative

Le Conseil constitutionnel examine d’abord l’article 1er modifiant le code pénal pour aggraver les peines encourues par les parents défaillants. Les sages relèvent que « la circonstance aggravante ainsi instituée suppose que les éléments constitutifs du délit précité soient préalablement réunis ». Cette disposition punit le fait de se soustraire volontairement à ses obligations légales au point de compromettre la sécurité ou l’éducation de l’enfant. Le juge écarte le grief tiré de la responsabilité du fait d’autrui car le parent est sanctionné pour son propre comportement. Cette solution confirme que le législateur peut durcir la réponse pénale face aux carences éducatives graves ayant conduit à la délinquance. La précision des termes employés garantit par ailleurs le respect du principe de légalité des délits et des peines sans risque d’arbitraire.

B. La proportionnalité des mesures de restriction de la liberté d’aller et venir

Les articles 13 et 14 instaurent une possibilité d’interdire aux mineurs de circuler sur la voie publique sans accompagnement durant certaines heures. Le Conseil estime que le législateur a « entendu empêcher la circulation sans surveillance et le regroupement de mineurs sur la voie publique ». Cette mesure poursuit un objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l’ordre public tout en protégeant les mineurs. La décision souligne que l’interdiction ne fait pas obstacle aux déplacements justifiés par des motifs professionnels, scolaires, médicaux ou administratifs impérieux. Le magistrat doit déterminer précisément les horaires en tenant compte de la situation personnelle et familiale du jeune concerné par la mesure. La liberté d’aller et venir n’est pas atteinte de manière disproportionnée dès lors que l’interdiction reste soumise au contrôle de l’autorité judiciaire.

II. La censure des régressions procédurales au nom de la protection constitutionnelle du mineur

A. L’invalidation des procédures de jugement immédiat et de détention prolongée

Le juge constitutionnel censure l’article 4 qui instaurait une procédure de comparution immédiate pour les mineurs âgés d’au moins seize ans. Il rappelle la « nécessité de rechercher le relèvement éducatif et moral des enfants délinquants par des mesures adaptées à leur âge ». Les dispositions critiquées permettaient un renvoi en jugement sans réserver cette voie à des infractions graves ou à des cas véritablement exceptionnels. Le Conseil juge que cette accélération procédurale contrevient au principe fondamental reconnu par les lois de la République en matière de justice des mineurs. De même, l’allongement à un an de la détention provisoire pour les mineurs de moins de seize ans est déclaré inconstitutionnel. Cette durée excessive méconnaît les exigences de protection liées à l’âge du mineur et la priorité donnée à son éducation.

B. Le rejet de l’automaticité des peines et des mesures privatives de liberté sans juge

L’article 7 visait à écarter le principe d’atténuation des peines pour les mineurs récidivistes de plus de seize ans de manière quasi systématique. Le Conseil censure cette mesure car « elle conduit à exclure, du seul fait de l’état de récidive légale, l’application des règles d’atténuation ». Le principe de l’atténuation de la responsabilité pénale des mineurs en fonction de l’âge possède une valeur constitutionnelle que le législateur doit respecter. La décision frappe également d’inconstitutionnalité le placement en rétention d’un mineur par un simple officier de police judiciaire sans contrôle préalable. Le législateur ne peut permettre une telle privation de liberté « sans prévoir une autorisation préalable ni même une information du juge des enfants ». Enfin, l’article 15 est écarté comme cavalier législatif pour son absence de lien avec le texte initial déposé devant le Parlement.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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