Cour d’appel administrative de Bordeaux, le 3 juin 2025, n°25BX00008

La Cour administrative d’appel de Bordeaux, par un arrêt rendu le 3 juin 2025, se prononce sur la légalité d’un refus de titre de séjour. Le litige porte sur la validité formelle d’une décision administrative dont la signature résulterait d’un procédé de reproduction mécanique ou numérique. Une ressortissante étrangère a sollicité la délivrance d’un titre de séjour auprès de l’autorité préfectorale qui a opposé un refus le 10 mai 2022. Le tribunal administratif de la Guyane a rejeté la demande d’annulation de cet acte par un jugement rendu le 30 septembre 2024. La requérante interjette appel en soutenant notamment que l’arrêté contesté n’a pas été signé manuellement par son auteur officiel. Elle produit des documents similaires pour démontrer l’usage d’un tampon encreur ou d’une reproduction numérique identique sur plusieurs décisions. La juridiction doit déterminer si l’apposition d’une signature par un tel procédé garantit l’identification de l’auteur et l’intégrité de la décision. La Cour annule le jugement et la décision en estimant que ce procédé méconnaît les exigences du code des relations entre le public et l’administration. L’étude portera sur l’irrégularité du procédé de signature (I) avant d’analyser l’annulation de l’acte et ses conséquences juridiques (II).

**I. L’irrégularité manifeste du procédé de reproduction de la signature**

**A. Le rejet du tampon encreur comme mode de signature manuelle**

L’article L. 212-1 du code des relations entre le public et l’administration impose la signature manuscrite de l’auteur de toute décision administrative. La juridiction d’appel constate que le tampon encreur ou la reproduction numérique ne permettent pas de « garantir le lien entre la signature et la décision ». Cette exigence de manuscrit assure que l’autorité compétente a personnellement pris connaissance et validé le contenu de l’acte avant sa notification. La preuve de l’usage d’un procédé mécanique est apportée par la comparaison de plusieurs arrêtés présentant des signatures rigoureusement identiques.

**B. L’exclusion de la qualification de signature électronique sécurisée**

Le juge administratif refuse de qualifier le tampon ou la reproduction numérique de signature électronique au sens de l’article L. 212-3 du code précité. Un tel procédé ne répond pas aux critères de sécurité permettant l’identification certaine du signataire et assurant l’intégrité totale de la décision. La Cour rappelle que l’absence de signature régulière entache l’acte d’un vice d’incompétence privant la décision de sa base légale. Le silence de l’administration devant la juridiction renforce la conviction des juges quant à l’irrégularité des modalités d’édiction de l’arrêté.

**II. L’annulation de l’acte et la protection des droits de l’administré**

**A. Le caractère déterminant du vice de forme sur la légalité externe**

L’annulation prononcée repose exclusivement sur le non-respect des formalités substantielles garantissant l’authenticité de la manifestation de volonté de l’administration. Le juge n’examine pas la régularité du jugement de première instance car le moyen relatif à l’incompétence de l’auteur suffit à l’annulation. La rigueur formaliste protège l’administré contre les décisions automatiques dépourvues de l’examen réel et personnalisé requis par les textes en vigueur. Cette solution souligne l’importance de la vigilance des requérants quant aux aspects matériels des actes notifiés par les services préfectoraux.

**B. La portée de l’injonction de réexamen sous contrainte conventionnelle**

La juridiction enjoint à l’autorité administrative de réexaminer la situation de l’intéressée dans un délai fixé à deux mois. L’arrêt précise que ce réexamen doit tenir compte de « la situation de violence aveugle » prévalant dans le pays d’origine. Cette mention fait écho à l’article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. L’administration doit délivrer une autorisation provisoire de séjour durant cette période pour garantir la présence légale de la requérante sur le territoire.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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