La cour administrative d’appel de Douai a rendu, le 17 septembre 2025, une décision relative aux conditions de délivrance d’un titre de séjour salarié. Un ressortissant étranger contestait le refus opposé par l’autorité préfectorale, ainsi que l’obligation de quitter le territoire et l’interdiction de retour qui l’accompagnaient. L’intéressé soutenait qu’une précédente régularisation le dispensait désormais de produire le visa de long séjour normalement exigé par les textes en vigueur. Après avoir essuyé un rejet devant le tribunal administratif de Lille le 31 juillet 2024, le requérant a saisi la juridiction d’appel. Il invoquait notamment une erreur de droit concernant ses conditions d’entrée et une erreur manifeste d’appréciation quant à sa situation personnelle. La juridiction devait déterminer si une admission au séjour passée neutralise définitivement l’exigence de visa pour les demandes ultérieures fondées sur l’accord franco-marocain. La cour confirme le rejet de la requête, jugeant que le défaut de contrat de travail visé justifiait à lui seul le refus de séjour. L’analyse de cette solution impose d’étudier la rigueur des conditions de fond exigées avant d’apprécier l’étendue du contrôle exercé sur le pouvoir préfectoral.
I. Une application rigoureuse des conditions de fond du titre de séjour salarié
A. L’exigence impérative d’un contrat de travail visé par l’autorité compétente
La cour rappelle que l’octroi du titre de séjour portant la mention « salarié » est strictement subordonné à la présentation d’un engagement professionnel formel. Selon les termes de l’arrêt, les ressortissants concernés reçoivent ce titre « sur présentation d’un contrat de travail visé par les autorités compétentes ». En l’espèce, le requérant ne produisait aucun document contractuel validé par l’administration, ce qui rendait sa demande juridiquement incomplète au regard de l’accord bilatéral. Cette carence documentaire constitue un motif de refus autonome que le juge administratif valide sans qu’il soit besoin d’examiner les autres griefs. L’autorité préfectorale aurait pris la même décision en se fondant exclusivement sur ce constat, neutralisant ainsi les critiques relatives aux conditions d’entrée.
B. L’absence d’effet pérenne d’une régularisation passée sur l’obligation de visa
Le requérant prétendait qu’une admission au séjour obtenue entre 2017 et 2018 avait définitivement régularisé son entrée sur le territoire national. La juridiction écarte cette argumentation en soulignant que la délivrance d’une première carte de séjour reste « subordonnée à la production par l’étranger du visa de long séjour ». L’existence d’un titre temporaire antérieur ne saurait constituer une dispense permanente pour les sollicitations futures fondées sur des bases juridiques distinctes. La cour maintient une distinction nette entre la possession ponctuelle d’un droit au séjour et la conformité pérenne aux règles d’entrée. Le droit positif impose une vérification renouvelée des critères légaux lors de chaque nouvelle demande de titre de séjour salarié. Cette rigueur dans l’examen des conditions de fond s’accompagne d’une reconnaissance explicite de la liberté de choix de l’administration dans ses procédures.
II. La confirmation du large pouvoir d’appréciation de l’autorité préfectorale
A. Le caractère purement facultatif du pouvoir discrétionnaire de régularisation
L’administration dispose de la faculté d’examiner d’office si un étranger peut prétendre à une admission exceptionnelle au séjour pour des motifs humanitaires. La cour précise qu’il ne s’agit là que « d’une simple possibilité pour le préfet, qui n’a aucune obligation de procéder à un tel examen ». Le juge administratif refuse de sanctionner l’absence d’usage de ce pouvoir discrétionnaire lorsque le requérant ne l’a pas expressément sollicité. Cette position renforce l’autonomie de l’autorité administrative dans la gestion des situations individuelles ne relevant pas directement des catégories légales. Le moyen tiré d’une erreur manifeste dans l’exercice de ce pouvoir de régularisation est ainsi jugé inopérant par les magistrats.
B. La proportionnalité contrôlée des mesures d’éloignement et d’interdiction de retour
La légalité de l’obligation de quitter le territoire et de l’interdiction de retour dépend de l’intensité des liens familiaux et de l’ancienneté du séjour. La juridiction observe que l’intéressé ne justifie pas avoir noué « des liens d’une particulière intensité » en dehors de sa relation professionnelle familiale. Les éléments produits, tels que des témoignages de clients ou une grossesse récente, ne suffisent pas à caractériser une insertion sociale exceptionnelle. L’interdiction de retour pour une durée d’un an est validée au regard de la précédente mesure d’éloignement restée sans exécution. La cour conclut que la situation personnelle du requérant n’entache pas les décisions préfectorales d’une erreur manifeste d’appréciation disproportionnée.