Cour d’appel administrative de Douai, le 5 juin 2025, n°24DA01392

Par un arrêt du 5 juin 2025, la Cour administrative d’appel de Douai apporte des précisions sur l’assiette de la taxe sur les salaires dans la fonction publique hospitalière. Un établissement public de santé sollicitait la restitution partielle de cette taxe acquittée au titre des années 2018 à 2020. Le litige portait sur l’inclusion des sommes versées aux agents en congés de maladie au titre du maintien de leur traitement. Après un refus de l’administration fiscale le 1er mars 2022, le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande le 16 mai 2024. Le requérant soutenait que ces versements constituaient des revenus de remplacement exclus de l’assiette par l’article 231 du code général des impôts. La juridiction d’appel devait déterminer si le maintien du traitement statutaire présente le caractère d’une rémunération taxable ou d’une prestation de sécurité sociale. Les juges décident que ce maintien constitue un « avantage statutaire ayant le caractère d’une rémunération » et doit donc être soumis à l’imposition litigieuse. L’analyse portera sur la qualification fiscale des indemnités de maladie puis sur l’application rigoureuse des conditions de la garantie contre les changements de doctrine.

I. La soumission du maintien de traitement à l’assiette de la taxe sur les salaires

A. La nature rémunératoire du maintien de traitement statutaire

La Cour administrative d’appel de Douai confirme que les sommes versées aux fonctionnaires hospitaliers en arrêt maladie relèvent bien du champ d’application de la taxe. Elle se fonde sur l’article 41 de la loi du 9 janvier 1986 pour définir les droits des agents en activité bénéficiant de tels congés. Selon les juges, le maintien du plein ou du demi-traitement constitue un « avantage statutaire ayant le caractère d’une rémunération » par application des dispositions législatives. Cette qualification juridique repose sur le lien direct entre le statut de l’agent et le versement des fonds par l’employeur public concerné. La solution retenue implique que toute somme dont la charge finale incombe directement à l’établissement doit être prise en compte pour le calcul de l’impôt.

B. L’absence d’assimilation aux prestations de sécurité sociale

Le requérant tentait d’assimiler ces traitements à des revenus de remplacement en raison de l’absence de service effectif accompli par l’agent pendant son indisponibilité. La juridiction rejette cette argumentation en distinguant les prestations de sécurité sociale versées par l’entremise de l’employeur des rémunérations statutaires maintenues. L’article 231 du code général des impôts prévoit certes une exception pour les prestations sociales, mais celle-ci ne s’étend pas aux traitements d’activité. Les sommes versées à ce titre « constituent une rémunération entrant dans l’assiette de la taxe sur les salaires » dès lors qu’elles incombent financièrement à l’employeur. Cette interprétation stricte de la loi fiscale écarte toute déduction pour les périodes d’arrêt maladie tout en limitant les possibilités de recours contre l’imposition.

II. L’inefficacité des moyens de protection juridique contre la loi fiscale

A. L’impossibilité de se prévaloir de la doctrine administrative

L’établissement public invoquait diverses instructions ministérielles et réponses parlementaires pour soutenir une interprétation plus favorable de l’assiette fiscale au titre des années litigieuses. La Cour administrative d’appel de Douai rappelle les conditions restrictives de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales pour invoquer une doctrine. Le contribuable ne peut utilement se fonder sur une interprétation formelle de la loi en l’absence de rehaussement opéré par l’administration. La taxe ayant été établie sur la base des propres déclarations du requérant, aucun rehaussement n’avait été notifié par les services fiscaux. Le second alinéa de ce texte est inapplicable puisque « le contribuable n’a pas lui-même appliqué ces doctrines » lors de ses déclarations initiales.

B. La portée limitée de l’invocation du principe d’égalité

Le dernier moyen soulevé reposait sur une rupture d’égalité, au motif qu’un autre établissement placé dans une situation identique aurait bénéficié d’un dégrèvement fiscal. Les magistrats d’appel écartent ce grief en affirmant que l’administration est tenue d’établir l’impôt conformément à la situation réelle du contribuable devant la loi. Une éventuelle erreur commise au profit d’un tiers ne saurait fonder un droit au maintien d’une situation irrégulière pour un autre redevable. L’imposition ayant été « établie conformément aux dispositions de l’article 231 du code général des impôts », toute violation du principe d’égalité est inopérante. Le juge administratif privilégie la légalité objective de l’impôt sur les considérations d’équité relative entre les différents usagers du service public hospitalier.

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Hassan KOHEN
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