La cour administrative d’appel de Lyon a rendu, le 3 juillet 2025, une décision relative au droit au séjour et à l’interdiction de retour. Un ressortissant étranger est entré mineur en France avant de subir une condamnation pour vol suivie d’une mesure d’éloignement vers son pays d’origine. Il est revenu clandestinement sur le territoire en 2019 et a formulé une nouvelle demande de titre de séjour rejetée par l’administration en 2023.
Le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d’annulation par un jugement rendu le 29 janvier 2024 après avoir examiné la légalité de l’acte. Le requérant a interjeté appel devant la juridiction supérieure pour contester le refus de titre de séjour, l’obligation de quitter le territoire et l’interdiction de retour. Il invoquait principalement la protection de sa vie privée et familiale ainsi que l’intérêt supérieur de ses quatre enfants mineurs résidant en France.
Le litige soulève la question de savoir si la présence d’enfants nés sur le sol français suffit à rendre disproportionnée une mesure d’éloignement malgré un séjour irrégulier. La cour administrative d’appel de Lyon a rejeté la requête en soulignant l’absence d’insertion professionnelle et la possibilité de reconstituer la cellule familiale à l’étranger. L’analyse de cet arrêt porte sur la confirmation du bien-fondé des mesures d’éloignement avant d’envisager la légalité de l’interdiction de retour.
I. La confirmation du bien-fondé des mesures d’éloignement
A. L’appréciation souveraine de l’atteinte à la vie privée et familiale
La juridiction administrative vérifie systématiquement si l’ingérence dans la vie privée est proportionnée aux buts légitimes poursuivis par l’autorité publique chargée de la police des étrangers. En l’espèce, le requérant se maintenait de façon irrégulière après avoir déjà fait l’objet d’une précédente mesure d’éloignement exécutée en 2016. La cour relève que sa présence récente ne saurait établir une insertion durable sur le territoire national. Elle précise d’ailleurs que l’intéressé « ne justifie pas davantage d’une insertion professionnelle présente ou passée en France ».
Les attaches familiales invoquées ne permettent pas, selon les magistrats, de faire obstacle à l’exécution de la mesure d’éloignement prise par le préfet. La circonstance que ses parents et ses sœurs résident régulièrement en France n’a pas été jugée déterminante faute de preuves suffisantes de liens intenses. Les juges considèrent que les décisions ne portent pas une « atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et familiale » au sens des stipulations conventionnelles. La solution retenue privilégie ainsi le respect des règles d’entrée sur le territoire au détriment d’une installation familiale non autorisée.
B. La primauté de l’ordre public sur l’intérêt des enfants
L’intérêt supérieur de l’enfant doit constituer une considération primordiale dans toute décision administrative touchant à la situation d’un mineur. Toutefois, la cour administrative d’appel de Lyon estime que ce principe ne garantit pas automatiquement un droit au séjour aux parents en situation irrégulière. Elle observe que les enfants sont nés alors que le père se trouvait en situation d’incarcération ou d’interdiction de retour. Le raisonnement s’appuie ici sur la possibilité effective de maintenir les liens familiaux hors des frontières nationales.
La décision souligne que « rien ne fait toutefois obstacle à la reconstitution de la cellule familiale » dans le pays d’origine du requérant ou de sa compagne. L’éloignement n’est donc pas regardé comme une rupture mais comme une opportunité de vie commune dans un autre État. Les magistrats estiment par conséquent que l’administration n’a pas méconnu l’intérêt supérieur des enfants mineurs en refusant la délivrance du titre de séjour. Cette position confirme la validité des mesures d’éloignement tout en ouvrant la discussion sur les modalités de l’interdiction de retour.
II. La validation de la légalité de l’interdiction de retour
A. Le contrôle restreint sur la motivation de la mesure
L’interdiction de retour sur le territoire français nécessite une motivation précise portant sur les critères légaux définis par le code de l’entrée et du séjour. Le requérant critiquait notamment l’absence d’examen particulier de sa situation personnelle par le représentant de l’État avant de prononcer cette interdiction. Cependant, la cour lyonnaise a choisi d’adopter les motifs des premiers juges pour écarter ce moyen de droit. Elle considère que la décision de première instance avait suffisamment répondu aux griefs portant sur la forme de l’acte contesté.
L’adoption de motifs permet une confirmation rapide de la légalité externe de l’acte administratif sans nécessiter de nouveaux développements jurisprudentiels. Les juges valident ainsi la procédure suivie par l’administration pour fixer la durée de l’interdiction de retour à une année. Cette approche confirme la présomption de régularité attachée aux décisions préfectorales lorsque l’examen global de la situation individuelle a été réalisé. La motivation est alors jugée suffisante dès lors qu’elle permet au destinataire de comprendre les raisons de son éviction du territoire.
B. La proportionnalité maintenue malgré la présence de la cellule familiale
L’appréciation de la proportionnalité de l’interdiction de retour repose sur une balance entre les impératifs de sécurité publique et les droits fondamentaux. La cour souligne que rien ne démontre que la compagne et les enfants « ne pourraient pas lui rendre visite dans son pays d’origine ». Elle suggère également la possibilité pour le requérant de se rendre en Serbie, pays dont sa conjointe possède la nationalité. La mesure d’interdiction n’est donc pas perçue comme un obstacle insurmontable au maintien de la vie familiale.
En jugeant que la décision n’est entachée d’aucune erreur dans l’appréciation de ses conséquences, les magistrats réaffirment le pouvoir discrétionnaire de l’administration. L’interdiction d’un an apparaît cohérente avec la durée du séjour irrégulier et l’absence de garanties sérieuses d’insertion. La juridiction rejette finalement l’ensemble des conclusions de la requête en confirmant le jugement rendu par le tribunal administratif de Grenoble. Cette solution illustre la fermeté du juge administratif envers les étrangers ayant persisté dans l’illégalité malgré des précédentes injonctions.