Cour d’appel administrative de Nancy, le 13 mai 2025, n°22NC01499

La cour administrative d’appel de Nancy a rendu, le 13 mai 2025, une décision relative au pouvoir disciplinaire de l’administration territoriale en période de crise sanitaire. Une adjointe administrative a subi une exclusion temporaire de fonctions de trois jours pour s’être présentée à son travail malgré des symptômes de Covid-19. L’autorité de nomination lui reprochait d’avoir méconnu les consignes de sécurité et d’avoir exposé ses collègues de bureau à un risque de contamination virale. Le tribunal administratif de Strasbourg a d’abord rejeté son recours tendant à l’annulation de cette sanction par un jugement du 12 avril 2022. La requérante soutient en appel qu’elle n’a commis aucun manquement et que la procédure disciplinaire est entachée d’une méconnaissance du droit au dossier. Elle conteste également la proportionnalité de la mesure au regard de sa situation médicale et de l’absence de prescription de test PCR. Le juge administratif doit décider si le non-respect des consignes sanitaires notoires caractérise une faute de nature à justifier légalement une exclusion temporaire. La juridiction rejette la requête en estimant que l’agente a mis délibérément en danger la santé des autres membres du service. Cette solution repose sur la caractérisation d’une faute disciplinaire par méconnaissance des impératifs sanitaires, justifiant une sanction proportionnée au service de la protection collective.

I. La caractérisation d’une faute disciplinaire par méconnaissance des impératifs sanitaires

A. L’exigence de prudence face à la symptomatologie virale

Le juge rappelle que les agents publics doivent respecter les consignes sanitaires nationales diffusées largement auprès de l’ensemble de la population durant la pandémie. L’arrêt souligne que l’agente « ne pouvait ignorer qu’en prenant son poste » elle risquait de transmettre le virus à ses collègues de bureau. Cette obligation de vigilance s’impose dès l’apparition des premiers symptômes évocateurs afin de garantir la sécurité et la continuité du service public. La juridiction considère que la requérante « aurait dû sans délai s’abstenir de se présenter » au travail pour prévenir toute propagation accidentelle de la maladie. Le comportement de l’intéressée est ainsi qualifié de fautif car il expose autrui à un danger sanitaire évitable dans un contexte exceptionnel.

B. L’inopérance des justifications tirées de l’environnement médical

L’argumentation de l’agente repose sur l’absence de test prescrit par son médecin traitant lors d’une consultation médicale réalisée le jour des faits litigieux. La cour d’appel écarte ce moyen en précisant que les tests étaient alors « disponibles sans ordonnance et gratuitement » pour tous les citoyens. L’absence de recommandation explicite d’un professionnel de santé ne dispense pas le fonctionnaire de son devoir élémentaire de prudence envers sa propre administration. L’arrêt précise que la possession d’un bureau isolé n’autorisait pas l’intéressée à « se dispenser d’appliquer les consignes » sanitaires en vigueur à l’époque. Cette solution renforce la responsabilité individuelle du travailleur public dans la gestion préventive des risques épidémiques majeurs au sein des locaux administratifs. La reconnaissance de cette faute grave par le juge d’appel permet d’apprécier la légalité de la sanction au regard des impératifs de santé publique.

II. Une sanction proportionnée au service de la protection de la santé collective

A. La validation d’une mesure fondée sur un motif unique suffisant

Le président de l’établissement public avait initialement retenu deux griefs distincts pour justifier le prononcé de l’exclusion temporaire contre cette agente territoriale. Le juge d’appel relève toutefois que le second motif tiré d’une prétendue obstination à revenir travailler n’est pas établi par le dossier. Il estime que le premier manquement lié au danger sanitaire justifie « à lui seul » le maintien d’une mesure disciplinaire appartenant au premier groupe. Cette technique juridique permet de sauvegarder la décision administrative dès lors que la faute principale demeure légalement caractérisée par les pièces produites. La cour confirme ainsi que la protection de la santé des agents publics constitue un fondement suffisant pour écarter définitivement la requête.

B. Le contrôle de l’adéquation de la réponse disciplinaire au risque encouru

La proportionnalité de la sanction est examinée au regard de la gravité du manquement constaté et du contexte pandémique particulièrement actif de l’année 2021. La cour estime que l’exclusion de trois jours n’est pas manifestement excessive compte tenu de la nécessité de préserver la santé du personnel. Cette fermeté jurisprudentielle s’explique par l’importance accordée à la « lutte contre la diffusion de la pandémie » au sein des différents services publics. Le juge exerce ici un contrôle complet sur le choix de la sanction en veillant à la cohérence entre la faute et l’acte. La décision rendue le 13 mai 2025 illustre la primauté de la sécurité sanitaire collective sur les intérêts particuliers des agents fautifs.

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Hassan KOHEN
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