Cour d’appel administrative de Nancy, le 17 juillet 2025, n°22NC01393

La Cour administrative d’appel de Nancy, par un arrêt rendu le 17 juillet 2025, précise les conditions d’inscription d’un établissement sur la liste de l’amiante. La juridiction administrative devait déterminer si la présence résiduelle de poussières et de stocks permettait de prolonger la période de reconnaissance légale d’un site.

Un établissement de fabrication de systèmes de freinage figurait sur la liste ministérielle pour la période allant de l’année 1968 à l’année 1996. L’instance représentative du personnel a sollicité l’extension de cette inscription jusqu’en 2015 en invoquant une exposition persistante des salariés au risque industriel.

L’autorité administrative a rejeté cette demande par une décision du 11 décembre 2019 après avoir recueilli les observations de la société concernée par l’exploitation. Saisi d’un recours en annulation, le tribunal administratif de Strasbourg a confirmé ce rejet par un jugement du 30 mars 2022 contre lequel appel fut interjeté.

Le comité social et économique soutient que l’exposition résiduelle demeure significative et que l’application restrictive de la loi méconnaît le droit à la santé. La question posée aux juges consiste à savoir si une pollution environnementale persistante suffit à caractériser un établissement de traitement au sens de la législation.

La Cour rejette la requête en retenant que « les opérations de fabrication de matériaux contenant de l’amiante avaient cessé au sein de l’établissement » dès juillet 1996. Elle souligne que l’absence de nettoyage des locaux ou le développement de pathologies professionnelles ne sauraient modifier la qualification juridique du site de production. Ce raisonnement repose sur une interprétation stricte de l’activité de fabrication (I) et sur l’exclusion des risques environnementaux du dispositif de l’allocation (II).

I. L’exigence d’une activité de fabrication effective et significative

A. La cessation constatée de l’usage industriel de l’amiante La Cour valide le constat selon lequel l’amiante n’entrait plus dans la composition des produits fabriqués à compter du mois de juillet 1996. Bien que des stocks aient été découverts ultérieurement, « il n’est pas établi que ces stocks résiduels auraient été utilisés pour la fabrication » après cette date. Les juges distinguent ainsi la simple présence de matériaux dangereux de leur intégration active dans le processus de production industrielle au sein des ateliers.

B. Le caractère déterminant du critère de fabrication Le juge administratif rappelle que l’inscription requiert que la fabrication ait « représenté sur la période en cause une part significative de l’activité » du site. Cette exigence textuelle limite le bénéfice du dispositif aux seules phases de production effective d’après les termes de la loi de financement de la sécurité sociale. La solution confirme que l’allocation de cessation anticipée ne constitue pas une réparation générale mais un régime lié à une activité industrielle parfaitement identifiée.

II. L’exclusion de la pollution environnementale du champ de l’allocation

A. L’indifférence des manquements à l’obligation de sécurité Les requérants invoquaient l’absence de nettoyage des poussières et le manque de protection des salariés pour justifier l’extension de la période d’inscription du site. La Cour écarte ces arguments en précisant que ces éléments « ne constituent pas des critères de qualification de ces établissements » prévus par la disposition législative. La méconnaissance des règles de sécurité par l’employeur relève de la responsabilité civile mais n’influe pas sur le classement administratif de l’unité de production.

B. L’autonomie du régime de l’allocation face à la faute inexcusable L’arrêt précise que la reconnaissance d’une faute inexcusable de l’employeur par les juridictions judiciaires demeure « sans incidence sur cette qualification » juridique du site. Le juge administratif préserve ainsi l’étanchéité entre le contentieux de la sécurité sociale et celui de l’inscription sur la liste établie par les ministres. Cette décision renforce la prévisibilité du régime de l’amiante en le cantonnant strictement aux critères temporels de la fabrication industrielle selon la loi.

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Hassan KOHEN
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