Cour d’appel administrative de Nancy, le 17 juillet 2025, n°24NC02884

Par un arrêt rendu le 17 juillet 2025, la Cour administrative d’appel de Nancy précise les règles de compétence territoriale pour le regroupement familial. Un ressortissant étranger sollicite la venue de son fils mineur en désignant un logement qu’il loue dans un département de l’Est. L’autorité préfectorale classe la demande sans suite au motif que le requérant n’occupe pas encore effectivement ce logement au moment du dépôt. Le Tribunal administratif de Nancy rejette la demande d’annulation de cette décision administrative par un jugement rendu le 1er octobre 2024. Le requérant interjette appel en soutenant que son projet d’établissement suffit à fonder la compétence de l’autorité administrative saisie de l’instruction. La juridiction doit déterminer si l’occupation réelle du logement constitue une condition de recevabilité géographique de la demande de regroupement familial. Elle juge que l’absence de résidence effective ne peut justifier un refus d’examen de la part de l’administration compétente.

I. La reconnaissance de la compétence territoriale fondée sur l’intention d’établissement A. L’application littérale des critères de localisation de la demande La Cour se fonde sur l’article L. 434-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Ce texte prévoit que l’autorité vérifie les conditions dans la commune où l’étranger réside ou « envisage de s’établir ». Cette formulation alternative permet au demandeur de choisir le lieu de sa future installation familiale pour introduire sa requête initiale. Le requérant justifiait d’un contrat de location pour un appartement situé dans le département concerné par la demande depuis plusieurs mois. L’administration ne peut ajouter une condition de résidence actuelle et permanente que la loi ne prévoit pas explicitement pour l’instruction.

B. L’illégalité du refus d’instruction fondé sur l’absence de résidence effective Le juge d’appel censure le raisonnement du préfet qui a refusé d’instruire le dossier pour un motif d’incompétence territoriale erroné. La décision attaquée est entachée d’une erreur de droit car elle méconnaît la portée réelle des dispositions législatives en vigueur. L’autorité ne pouvait « opposer à l’intéressé le motif qu’il ne justifiait pas résider effectivement » dans le logement désigné par lui. L’annulation du jugement de première instance s’impose puisque les premiers juges n’ont pas relevé cette interprétation inexacte du code applicable. Cette solution protège le droit des étrangers à organiser leur installation préalable à l’arrivée définitive de leurs enfants mineurs.

II. Le rejet des motifs administratifs étrangers aux conditions légales A. L’exclusion des arguments relatifs à l’optimisation des délais de procédure L’autorité préfectorale invoquait un risque de détournement de procédure lié aux disparités de délais de traitement entre les différents services départementaux. La Cour administrative d’appel considère que cet argument n’est pas « de nature à justifier qu’il refuse de se prononcer ». Les impératifs de gestion interne des flux de dossiers ne sauraient faire obstacle à l’exercice d’un droit individuel garanti. L’administration doit limiter son examen aux critères de ressources et de logement sans tenir compte de considérations d’opportunité ou d’efficacité. Le juge administratif rappelle ainsi que la compétence territoriale est une règle d’ordre public qui ne souffre aucune dérogation arbitraire.

B. Les conséquences de l’annulation sur l’obligation de réexamen de la situation L’annulation de la décision de classement sans suite impose à l’autorité préfectorale de reprendre sans délai l’instruction complète du dossier déposé. Le juge enjoint explicitement à l’administration de procéder à cet examen dans un délai de deux mois suivant la notification officielle. Cette injonction garantit l’effectivité du recours juridictionnel et la continuité de la procédure de regroupement familial entamée par le requérant. La décision de la Cour assure le respect du droit à mener une vie familiale normale conformément aux principes républicains. Le contentieux souligne la nécessaire neutralité des services de l’État dans l’application rigoureuse des règles de procédure administrative.

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Hassan KOHEN
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