Cour d’appel administrative de Nancy, le 19 décembre 2024, n°22NC02374

Par un arrêt rendu le 19 décembre 2024, la Cour administrative d’appel de Nancy précise les conditions de récupération des aides indûment perçues au titre du fonds de solidarité. Une association a bénéficié d’aides financières entre décembre 2020 et mars 2021 pour compenser les pertes liées à l’épidémie de Covid-19. À la suite d’un contrôle, l’administration a constaté des incohérences comptables et a réclamé le remboursement de la somme de 22 494 euros. Le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande d’annulation de cette décision par un jugement rendu le 19 juillet 2022. L’association soutient que la procédure de contrôle est irrégulière et que les erreurs déclaratives relèvent de sa bonne foi. Les juges d’appel doivent déterminer si l’administration peut légalement exiger la restitution des aides sans recourir à une procédure de contrôle fiscal. La juridiction confirme la légalité de la récupération en soulignant l’indépendance de cette procédure et l’obligation de justifier précisément la baisse de chiffre d’affaires. L’analyse de cette décision suppose d’examiner la régularité de la procédure de contrôle (I) avant d’étudier les exigences relatives à la preuve de l’éligibilité (II).

I. La validation du cadre juridique de contrôle des aides exceptionnelles

A. L’autonomie de la procédure de récupération des indus

L’article 3 de l’ordonnance du 25 mars 2020 prévoit que les agents des finances publiques peuvent demander tout document comptable pour justifier l’éligibilité. La Cour souligne expressément que « la procédure prévue au présent II ne constitue pas une procédure de contrôle de l’impôt ». Ainsi, l’administration peut valablement relever des discordances entre les déclarations et les documents produits sans respecter le formalisme du contrôle fiscal. Cette solution garantit une action rapide de l’État pour protéger les deniers publics durant une période de crise économique majeure.

B. La sanction de l’irrecevabilité des moyens nouveaux en appel

La requérante invoquait pour la première fois devant les juges d’appel le défaut de motivation de la décision administrative contestée. Les juges rejettent ce moyen car l’association n’avait soulevé que des griefs de légalité interne devant le tribunal administratif de Strasbourg. Le moyen tiré de l’insuffisance de motivation relève d’une cause juridique distincte et n’est pas considéré comme étant d’ordre public par la juridiction. La Cour administrative d’appel de Nancy fait ici une application rigoureuse de la règle interdisant l’introduction de prétentions nouvelles en appel. Cette rigueur procédurale précède l’examen au fond de la condition de baisse du chiffre d’affaires imposée par les textes réglementaires.

II. La rigueur des conditions de preuve relatives à l’éligibilité au fonds

A. L’exigence d’une corrélation stricte entre déclarations et comptabilité

Le bénéfice du fonds est conditionné par une perte de chiffre d’affaires d’au moins 50 % durant la période de référence définie. L’administration a constaté que les montants déclarés par l’organisme ne correspondaient aucunement aux écritures comptables ou aux relevés bancaires fournis. La Cour relève que l’association « n’établit pas non plus avoir subi une perte de chiffre d’affaires de 50 % » pour les mois concernés. Le juge administratif impose ainsi une charge de la preuve pesant quasi exclusivement sur le bénéficiaire de la subvention publique.

B. L’inefficacité des moyens tirés de la bonne foi et du droit à l’erreur

Pour justifier les écarts financiers, l’association invoquait une erreur matérielle consistant en l’intégration de la taxe sur la valeur ajoutée. Les juges d’appel écartent cet argument en précisant que le demandeur « ne saurait à cet égard utilement se prévaloir d’un droit à l’erreur ». La solution est logique puisque l’aide repose sur des éléments déclaratifs objectifs dont l’exactitude conditionne la validité du versement. La neutralité du juge face aux intentions du contribuable renforce la sécurité juridique et l’égalité entre les entreprises sollicitant ce fonds.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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