Cour d’appel administrative de Nancy, le 28 janvier 2025, n°21NC02494

La cour administrative d’appel de Nancy a rendu, le 28 janvier 2025, un arrêt relatif à la reconnaissance de l’imputabilité au service d’une pathologie auditive. Un gendarme, affecté temporairement aux Antilles lors du passage d’un ouragan, a sollicité la prise en charge de frais médicaux pour des acouphènes bilatéraux. L’administration a opposé un refus au motif que le lien entre le service et l’affection n’était pas suffisamment établi par les éléments produits. Le tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande d’annulation dirigée contre la décision ministérielle confirmant ce refus de prise en charge financière. Saisi d’un appel, le juge devait déterminer si une erreur matérielle du jugement et l’absence de troubles antérieurs suffisaient à entraîner l’annulation. La juridiction d’appel confirme le rejet de la requête en écartant les irrégularités invoquées et en constatant l’absence de preuve du lien de causalité. L’analyse portera d’abord sur la régularité du jugement de première instance avant d’envisager les conditions de fond liées à la preuve de l’imputabilité.

I. La confirmation de la régularité formelle du jugement de première instance

A. L’absence de portée d’une erreur matérielle de désignation

Le requérant contestait la validité du jugement car ce dernier mentionnait, par erreur, une décision émanant d’une commission de recours au lieu du ministre. Le juge d’appel relève toutefois que « cette mention constitue une simple erreur de plume » sans incidence réelle sur l’identification de l’acte attaqué. Cette position pragmatique évite l’annulation d’une décision juridictionnelle pour une imprécision formelle n’ayant pas induit les parties en erreur sur l’objet du litige. La cour administrative d’appel de Nancy privilégie ainsi la substance du droit sur le formalisme excessif pour garantir une bonne administration de la justice.

B. L’exclusion des moyens d’office du champ de la régularité juridictionnelle

L’omission d’un moyen d’ordre public n’affecte pas la régularité du jugement mais relève exclusivement du bien-fondé de la réponse apportée par le tribunal. Cette solution classique préserve la distinction entre la structure formelle de la décision de justice et la pertinence juridique du raisonnement tenu par les juges. La cour refuse de sanctionner le jugement sur ce fondement, rappelant que l’erreur de droit commise par les premiers juges s’apprécie au stade du fond. Cette distinction procédurale est essentielle pour déterminer l’étendue du contrôle exercé par la juridiction supérieure lors de l’examen des griefs du requérant.

II. Une appréciation exigeante de la preuve du lien de causalité avec le service

A. L’inopérance de la responsabilité sans faute dans le cadre du recours pour excès de pouvoir

Le requérant invoquait une rupture d’égalité devant les charges publiques pour contester la légalité interne de la décision administrative de refus de prise en charge. Toutefois, ce fondement indemnitaire est « sans incidence à l’appui de telles conclusions » dirigées exclusivement contre un acte administratif unilatéral dans un litige d’annulation. Le juge sépare strictement le contentieux de la légalité, fondé sur l’excès de pouvoir, du contentieux de la responsabilité visant à réparer un préjudice spécial. Cette rigueur méthodologique empêche le requérant de détourner les règles de compétence et de recevabilité propres à chaque type de recours contentieux.

B. L’insuffisance de preuves médicales postérieures pour établir l’imputabilité

Le militaire prétendait n’avoir aucun trouble auditif avant l’ouragan mais n’apportait que des examens médicaux réalisés tardivement après l’événement climatique invoqué comme cause. Pour la cour, « la seule production d’audiogrammes réalisés postérieurement à ce phénomène » ne permet pas de démontrer l’existence certaine d’un lien de causalité direct. La preuve de l’imputabilité au service impose la démonstration d’un fait précis survenu pendant l’exercice des fonctions, soutenu par des constatations médicales contemporaines. Ce rejet confirme la sévérité du juge administratif face aux pathologies dont l’origine peut être multifactorielle ou préexistante aux missions de l’agent.

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Hassan KOHEN
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