La Cour administrative d’appel de Nantes a rendu, le 10 janvier 2025, une décision précisant les conditions d’admission exceptionnelle au séjour des jeunes majeurs. Un ressortissant étranger sollicitait la délivrance d’un titre de séjour sur le fondement du code de l’entrée et du séjour des étrangers. Le préfet a rejeté cette demande en raison d’un manque de sérieux dans la formation et d’une menace pour l’ordre public. Le tribunal administratif de Caen a partiellement annulé l’arrêté concernant les mesures d’éloignement mais a maintenu le refus de délivrance du titre. Le requérant soutient en appel que les premiers juges n’ont pas répondu à tous ses moyens concernant la régularité du jugement attaqué. Le litige porte sur l’appréciation globale du sérieux de la formation professionnelle suivie par l’étranger avant sa majorité. La juridiction d’appel confirme la légalité du refus de séjour en raison du pouvoir discrétionnaire de l’administration sur les critères d’insertion. Ce commentaire analysera l’interprétation rigoureuse des conditions d’admission au séjour (I) avant d’étudier la validation du pouvoir d’appréciation de l’administration (II).
I. L’interprétation rigoureuse des conditions d’admission exceptionnelle au séjour
A. La subordination du titre au sérieux de la formation professionnelle
L’article L. 435-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers soumet la délivrance du titre au « caractère réel et sérieux du suivi de cette formation ». La juridiction administrative confirme ici que la seule existence d’un contrat d’apprentissage ne suffit pas à établir ce sérieux. Les juges relèvent que l’intéressé a fait l’objet d’un « rappel à l’ordre pour manque de travail » malgré des appréciations favorables par ailleurs. Le magistrat refuse de considérer le parcours scolaire comme suffisant dès lors que les résultats globaux témoignent d’un investissement irrégulier. Cette sévérité jurisprudentielle limite la portée des témoignages émanant de l’employeur ou des enseignants lorsque le dossier scolaire présente des lacunes. La Cour souligne que le préfet doit porter une « appréciation globale » sur la situation sans s’arrêter aux seuls éléments positifs du dossier.
B. L’influence déterminante de la persistance des attaches au pays d’origine
L’administration doit également apprécier la « nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d’origine » avant de statuer. L’arrêt souligne que le requérant conserve des attaches familiales directes dans son pays de naissance où résident son père et sa fratrie. Cette circonstance affaiblit la demande d’admission exceptionnelle malgré l’avis de la structure d’accueil sur son insertion dans la société française. La Cour relève que l’intéressé ne justifie pas de façon assez précise de son insertion effective au-delà de son activité professionnelle. La présence de membres de la famille nucléaire à l’étranger constitue souvent un obstacle insurmontable pour obtenir une régularisation à titre exceptionnel. Ce cadre juridique strict permet ainsi de maintenir un équilibre entre l’accueil des mineurs et la maîtrise des flux migratoires majeurs.
II. La confirmation de la validité de l’acte et de sa proportionnalité
A. La validité de la neutralisation des motifs par la juridiction de premier ressort
Le tribunal administratif de Caen avait neutralisé le motif tiré de la menace à l’ordre public pour fonder sa décision de rejet. La Cour d’appel de Nantes valide cette méthode en jugeant que le premier motif relatif à la formation suffisait à fonder l’arrêté. Par conséquent, les moyens dirigés contre le motif surabondant deviennent inopérants et n’appellent pas de réponse au fond de la part des juges. L’arrêt précise que le tribunal n’a commis aucune irrégularité en refusant de statuer sur le moyen tiré du code de procédure pénale. Cette technique contentieuse de la substitution ou de la neutralisation de motifs renforce l’efficacité du contrôle juridique sur les décisions administratives complexes. La décision confirme que l’administration peut légalement écarter une demande dès lors qu’un seul des critères légaux fait défaut.
B. L’absence d’atteinte disproportionnée au droit à la vie privée et familiale
L’obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme. La présence sur le territoire français depuis seulement deux années demeure insuffisante pour caractériser une atteinte disproportionnée à la vie privée. L’intéressé a vécu la majeure partie de son existence dans son pays d’origine et n’établit pas d’attaches familiales fortes en France. Le préfet ne commet pas d’erreur manifeste d’appréciation en estimant que le retour dans le pays de destination est possible sans rupture excessive. La solution retenue par la Cour de Nantes s’inscrit dans une application constante et rigoureuse des principes de protection du séjour. La juridiction rejette ainsi l’ensemble des conclusions aux fins d’annulation et d’injonction présentées par le requérant étranger.