La Cour administrative d’appel de Nantes a rendu, le 4 avril 2025, un arrêt précisant l’étendue du pouvoir disciplinaire au sein des courses hippiques. Une société propriétaire de chevaux a exercé des activités d’entraînement sans disposer de l’autorisation administrative préalable requise par les autorités de régulation du secteur. L’organisme compétent a prononcé une interdiction de faire courir ses chevaux pendant plusieurs mois ainsi qu’une amende administrative de quinze mille euros.
Le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande d’annulation de cette sanction par un jugement en date du 26 janvier 2024. La société requérante conteste devant la juridiction d’appel la régularité de la procédure suivie ainsi que la proportionnalité des mesures de police retenues. Elle invoque notamment un défaut d’impartialité des commissaires et une méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines.
Le juge administratif doit déterminer si la combinaison de textes disciplinaires permet d’identifier clairement les sanctions applicables et si l’usage de preuves comptables respecte le principe de loyauté. Il lui appartient également d’apprécier si les conséquences économiques d’une telle mesure n’excèdent pas ce que requiert la protection de l’ordre public hippique.
La Cour écarte l’ensemble des moyens en confirmant que les dispositions réglementaires forment un ensemble cohérent et suffisamment intelligible pour fonder la sanction. Elle valide le recours à des éléments de preuve soumis au débat contradictoire et juge la mesure proportionnée à la gravité des manquements constatés. La régularité du cadre procédural et de l’administration de la preuve précède l’analyse de la légalité du fondement normatif et de la proportionnalité de la sanction.
I. La validation du cadre procédural et de l’administration de la preuve
A. Une rigueur mesurée dans l’appréciation des garanties d’impartialité et de motivation
La motivation d’une décision administrative défavorable doit impérativement comporter l’énoncé des considérations de droit et de fait constituant le fondement de la mesure. L’arrêt précise que la mention des articles du code des courses et la description précise de l’activité non autorisée satisfont pleinement à cette exigence. La décision attaquée « énonce les considérations de droit et de fait qui la fonde » de manière suffisante pour informer l’administré.
La requérante invoquait par ailleurs un défaut d’impartialité résultant de sanctions antérieures prononcées contre un de ses salariés par les mêmes commissaires. Les juges considèrent que « la procédure de poursuite d’un salarié d’une société de courses est distincte de celle dirigée contre la société qui l’emploie ». Cette indépendance des procédures garantit l’absence de préjugé défavorable de la part de l’organisme de régulation lors de l’examen du dossier.
Le grief tiré de la méconnaissance des stipulations de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme est jugé inopérant. La commission supérieure de l’organisme de régulation « ne présentant pas le caractère d’une juridiction », elle n’est pas soumise aux exigences propres aux tribunaux. Cette distinction fondamentale entre instance disciplinaire administrative et juridictionnelle permet de valider la composition de l’organe de sanction.
B. L’admissibilité des constatations matérielles issues d’une enquête administrative
La preuve des manquements professionnels peut résulter de documents comptables obtenus lors d’une enquête conduite par les services spécialisés du ministère de l’intérieur. L’utilisation de factures démontrant une activité d’entraînement occulte « ne saurait caractériser une méconnaissance du principe de loyauté de la preuve » selon la Cour. La régularité de cette administration de la preuve repose essentiellement sur le respect du caractère contradictoire de la procédure disciplinaire.
L’ensemble des pièces du dossier a été soumis à une procédure contradictoire préalable, permettant à la société propriétaire de présenter ses observations utiles. Le juge administratif privilégie ici la réalité matérielle des faits dès lors que les droits de la défense ont été préservés durant l’instance. La loyauté de la preuve se trouve ainsi garantie par la transparence des échanges entre l’administration et la personne poursuivie.
II. La consécration de la légalité et de la proportionnalité de la sanction
A. La clarté de la base légale par la combinaison des textes disciplinaires
Le principe de légalité impose que les sanctions administratives reposent sur une norme claire, accessible et prévisible pour les professionnels du secteur hippique. La requérante soulevait une exception d’illégalité à l’encontre du code des courses au trot, dénonçant une imprécision dans la détermination des peines applicables. Les juges rejettent cette analyse en opérant une lecture combinée des articles définissant les sanctions et les pouvoirs des commissaires.
L’arrêt souligne que les sanctions administratives sont définies à l’article 25 du code, tandis que l’article 96 précise les pouvoirs des autorités compétentes. Cette articulation permet de fixer les sanctions « dans les conditions de quantum et de maximum précisées à l’article 96 de ce même code ». La norme respecte ainsi les objectifs constitutionnels de clarté et d’intelligibilité en dépit de la dispersion des dispositions disciplinaires.
Le droit positif se trouve conforté par cette interprétation qui assure la sécurité juridique nécessaire au bon fonctionnement des compétitions de chevaux. Les propriétaires ne peuvent ignorer l’étendue des risques encourus en cas de violation flagrante des obligations liées à leur agrément professionnel. La base légale de la sanction est donc déclarée conforme aux principes fondamentaux du droit répressif administratif.
B. Une appréciation souveraine de la gravité des faits face aux conséquences économiques
Le contrôle du juge sur la proportionnalité de la sanction s’exerce en tenant compte de la matérialité des faits et des antécédents de l’intéressé. La société ne contestait pas avoir réalisé des prestations d’entraînement sans autorisation pour le compte de clients tiers de son écurie. La gravité de ces faits est accentuée par le passé disciplinaire du gérant et les manquements antérieurs constatés au sein de la structure.
La requérante faisait valoir que l’interdiction de courir et l’amende de quinze mille euros entraînaient une cessation inéluctable de son activité économique. La Cour écarte cet argument en estimant que cette circonstance « ne permet pas de regarder la décision en cause comme étant disproportionnée ». La protection de la régularité des courses et l’intérêt général l’emportent sur les difficultés financières particulières de la société sanctionnée.
L’erreur d’appréciation alléguée ne peut être retenue face à une pratique systématique d’entraînement non déclaré portant atteinte à la loyauté des compétitions. Le juge administratif maintient une position ferme quant à la sévérité nécessaire des sanctions dans un secteur où la moralité est essentielle. L’arrêt de la Cour administrative d’appel de Nantes confirme ainsi la validité intégrale de la décision prise par l’organisme de régulation.