Cour d’appel administrative de Paris, le 13 février 2025, n°24PA04307

La Cour administrative d’appel de Paris, par un arrêt du 13 février 2025, définit les limites du pouvoir des premiers juges en matière de procédure. Une société sollicitait l’indemnisation d’un préjudice fiscal né du paiement indu d’une contribution tarifaire d’acheminement et de la taxe sur la valeur ajoutée afférente. Le Tribunal administratif de Paris a rendu une ordonnance le 26 septembre 2024 constatant le désistement d’office de la demanderesse pour défaut de réponse. La requérante soutient que son intention de maintenir ses conclusions était évidente puisque le litige s’inscrivait dans une série de recours juridiques identiques. Le juge d’appel doit déterminer si le silence du justiciable suffit à fonder un désistement lorsque l’intérêt à agir demeure objectivement établi par le dossier. La cour annule l’ordonnance attaquée car rien ne permettait au tribunal de s’interroger sérieusement sur le maintien de l’intérêt que la requête conservait pour l’auteur. L’étude de cette solution nécessite d’analyser l’encadrement du désistement d’office avant d’examiner le renforcement de l’office du juge d’appel en cette matière.

I. L’encadrement rigoureux du recours au désistement d’office

A. La persistance manifeste de l’intérêt à agir de la requérante Le code de justice administrative autorise le président d’une formation de jugement à inviter le requérant à confirmer expressément le maintien de ses conclusions initiales. Cette faculté est toutefois conditionnée au fait que « l’état du dossier permet de s’interroger sur l’intérêt que la requête conserve pour son auteur ». D’abord, la mise en demeure doit mentionner qu’un défaut de confirmation dans le délai imparti entraînera le désistement automatique de l’ensemble des conclusions. Or, la société demandait une indemnité importante pour une taxe indûment supportée, sans qu’aucun versement partiel ne soit intervenu durant le cours de l’instance.

B. L’erreur d’appréciation du premier juge sur l’état du dossier La juridiction d’appel relève qu’aucun élément concret ne permettait objectivement de douter de la volonté de la société de poursuivre cette action indemnitaire engagée. La requête s’inscrivait par ailleurs dans une série contentieuse identifiée où les parties attendaient la position imminente du Conseil d’État sur une question similaire. Dans ces conditions, le défaut de réponse à la demande de confirmation ne pouvait légalement suffire à justifier le constat d’un désistement d’office. Le constat de cette erreur d’appréciation par les juges parisiens impose alors une analyse précise de la mission dévolue désormais au juge d’appel.

II. Le renforcement de l’office du juge d’appel en matière procédurale

A. Le contrôle étendu des circonstances de fait de l’espèce Il incombe au juge d’appel d’apprécier si le premier juge a fait une « juste application au vu de l’ensemble des circonstances de l’espèce ». Désormais, ce contrôle porte sur l’objet du litige, son évolution durant la procédure, ainsi que sur la chronologie précise de l’instruction menée. La Cour administrative d’appel de Paris vérifie ainsi que les garanties procédurales offertes aux justiciables ont été respectées durant toutes les étapes de l’instance. En effet, une telle exigence évite que des considérations purement formelles n’aboutissent à l’extinction injustifiée d’un litige dont l’enjeu juridique reste actuel.

B. La protection du droit au recours contre une sanction automatique L’annulation de l’ordonnance irrégulière rappelle que le désistement d’office constitue une mesure grave qui ne saurait reposer sur une simple présomption de désintérêt manifeste. Cette décision protège le droit fondamental au juge en empêchant que le mécanisme de l’article R. 612-5-1 ne devienne un outil de gestion comptable. Le renvoi de l’affaire devant le Tribunal administratif de Paris garantit finalement à la société un examen complet et effectif de ses prétentions au fond. Ainsi, les juges soulignent que la célérité de l’instruction ne doit jamais primer sur la protection nécessaire des droits procéduraux des parties au procès.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

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