Cour d’appel administrative de Paris, le 5 mars 2025, n°24PA03035

La Cour administrative d’appel de Paris a rendu un arrêt le 5 mars 2025 relatif à la légalité d’une mesure d’éloignement. Un ressortissant étranger a fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire français en 2022 sans exécution immédiate. Lors d’une interpellation en 2024, l’autorité préfectorale a prononcé son placement en rétention administrative par un nouvel arrêté. L’intéressé a contesté cette mesure devant le tribunal administratif de Paris en invoquant l’existence d’une nouvelle décision d’éloignement révélée. Le premier juge a annulé l’arrêté contesté pour défaut d’examen réel de la situation personnelle du requérant avant l’édiction de l’acte. L’administration a interjeté appel de ce jugement en soutenant que l’état de santé n’avait pas été mentionné lors de l’audition policière. La juridiction d’appel devait déterminer si l’absence d’avis médical préalable à une mesure d’éloignement entachait celle-ci d’illégalité malgré une expertise postérieure. La Cour administrative d’appel de Paris confirme la solution des premiers juges en rejetant l’argumentation de l’administration concernant les éléments médicaux produits. Le raisonnement s’articule autour de la caractérisation d’une nouvelle décision et des exigences strictes liées au contrôle de la situation individuelle.

I. La reconnaissance d’une décision nouvelle imposant un examen actualisé

A. La substitution de l’acte initial par une décision révélée

Le litige porte sur la nature juridique de l’acte pris par le préfet lors de l’interpellation du ressortissant étranger. L’arrêt souligne que le placement en rétention avait « fait naître une nouvelle décision portant obligation de quitter le territoire français ». Cette mesure s’est alors « substituée à l’arrêté initial » pris deux ans auparavant par une autre autorité administrative. La reconnaissance d’une décision implicite permet au juge d’exercer un contrôle plein sur la légalité de l’éloignement actuel de l’intéressé. Cette substitution impose à l’administration de procéder à un nouvel examen complet des circonstances de fait et de droit applicables.

B. L’exigence impérative d’un examen effectif de la situation personnelle

L’autorité administrative doit s’assurer de l’absence d’obstacles à l’éloignement, particulièrement lorsque des éléments de santé sont susceptibles d’interférer. La Cour relève que l’administration n’établit pas avoir « examiné la situation personnelle de l’intéressé préalablement à l’édiction de cette décision ». Le défaut d’examen constitue un vice de procédure substantiel qui affecte la validité même de l’acte administratif contesté devant le juge. L’obligation de quitter le territoire français nécessite une attention particulière aux vulnérabilités du ressortissant étranger lors de son interpellation.

II. L’inefficacité des justifications médicales postérieures à l’édiction

A. L’irrecevabilité du fondement médical produit a posteriori

L’administration a produit un avis du médecin d’un organisme public pour tenter de justifier la légalité de sa décision. Cet avis médical était toutefois « postérieur à l’édiction de la décision en litige » selon les constatations précises de la juridiction d’appel. La Cour juge que cet élément ne saurait utilement établir la réalité d’un examen préalable de la situation médicale du requérant. L’administration ne peut pas régulariser a posteriori une décision dont le fondement n’a pas été vérifié au moment de sa signature. La validité d’un acte administratif s’apprécie exclusivement à la date de son édiction par l’autorité compétente.

B. La sanction du défaut de diligence face aux vulnérabilités de l’étranger

La Cour écarte l’argument administratif relatif au silence du requérant sur son état de santé pendant son audition par les services de police. L’arrêt souligne que l’intéressé a été « admis au service médical d’urgence et de soins » de l’aéroport durant sa garde à vue. Cette circonstance matérielle contredit l’absence alléguée d’éléments alertant l’administration sur la pathologie dont souffrait le ressortissant étranger lors du contrôle. Le juge administratif exerce ainsi un contrôle rigoureux sur la diligence de l’autorité préfectorale dans l’appréciation des garanties individuelles. La confirmation de l’annulation garantit le respect effectif du droit à un examen attentif de la situation personnelle des étrangers.

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Hassan KOHEN
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