La Cour administrative d’appel de Paris a rendu le 6 mars 2025 une décision relative à l’assujettissement aux prélèvements sociaux des produits d’assurance-vie. Un bénéficiaire contestait la déduction de contributions sociales opérée sur les sommes versées après le décès de la souscriptrice de plusieurs contrats d’assurance. Le tribunal administratif de Montreuil avait précédemment rejeté sa demande de décharge par un jugement rendu en date du 10 janvier 2023. Devant les juges d’appel, le requérant invoque une méconnaissance du droit de propriété garanti par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme. Il soutient que la loi fiscale demeure imprécise quant à l’identité du véritable redevable entre le souscripteur du contrat et son bénéficiaire. La question posée porte sur la clarté des dispositions du code de la sécurité sociale concernant la taxation des contrats en unités de compte. La juridiction rejette la requête en considérant que le souscripteur décédé demeure le redevable légal de la contribution malgré l’ouverture de la succession. L’étude du sens de la décision précédera l’analyse de sa valeur au regard des exigences posées par les engagements internationaux de la France.
I. L’identification rigoureuse du redevable de la contribution sociale
A. Le lien structurel entre le fait générateur et le dénouement
L’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale prévoit l’assujettissement des produits de placements lors du dénouement des contrats ou du décès de l’assuré. Les juges soulignent que cette contribution s’applique spécifiquement aux contrats en unités de compte dont le dénouement intervient par la force des choses. La loi organise un prélèvement à la source effectué par la personne qui assure le paiement des revenus pour le compte du Trésor. Cette technique garantit l’efficacité du recouvrement fiscal sur des sommes qui n’ont pas encore été effectivement perçues par les héritiers du défunt. La décision confirme ainsi que l’événement du décès constitue le déclencheur temporel de l’exigibilité de la dette fiscale envers l’État.
B. La désignation de l’assujetti par l’économie du dispositif légal
La Cour administrative d’appel de Paris juge qu’il résulte de « l’économie du dispositif » que le souscripteur est le seul redevable de la taxe. Bien que le fait générateur soit le décès, la dette fiscale naît techniquement sur le patrimoine de celui qui avait initialement investi les fonds. Le bénéficiaire ne supporte donc pas personnellement la charge d’une dette qui lui serait propre selon l’analyse rigoureuse retenue par les magistrats. Cette interprétation permet de maintenir une cohérence globale avec les règles de l’impôt sur le revenu applicables aux revenus de capitaux mobiliers. Le juge refuse ainsi de dissocier la titularité des produits accumulés de l’obligation fiscale qui leur est intrinsèquement attachée.
II. La validation conventionnelle du prélèvement sur les unités de compte
A. L’absence d’imprécision préjudiciable au droit de propriété
Le requérant prétendait que l’imprécision du texte violait le premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme. La juridiction écarte ce grief en affirmant que le degré de précision requis pour justifier une contribution publique est ici largement atteint. « L’identité du redevable » est déduite logiquement de la structure combinée des articles du code général des impôts et du code de la sécurité sociale. Le juge refuse donc de constater une privation de propriété qui résulterait d’un dispositif législatif insuffisamment explicite ou arbitraire. Cette position renforce la sécurité juridique des prélèvements sociaux en confirmant la clarté des obligations pesant sur les compagnies d’assurance.
B. La portée de la taxation différée sur les transmissions financières
Cette solution confirme que la transmission de l’assurance-vie n’exonère pas les gains accumulés de leur participation normale au financement de la protection sociale. La décision sécurise les pratiques des établissements financiers qui procèdent systématiquement à ces retenues avant le versement effectif des capitaux aux bénéficiaires. En validant ce mécanisme, la Cour prévient toute velléité de contestation fondée sur une distinction entre la personnalité du défunt et celle de ses successeurs. Cette rigueur juridique assure la pérennité d’une ressource fiscale importante sur des placements financiers qui bénéficient par ailleurs d’un cadre successoral dérogatoire. L’arrêt marque ainsi une volonté de préserver l’équilibre entre les avantages de l’assurance-vie et l’équité devant les charges publiques.