La Cour administrative d’appel de Toulouse s’est prononcée, le 28 janvier 2025, sur la légalité d’un refus de titre de séjour opposé à un travailleur étranger salarié. L’enjeu de ce litige réside dans l’articulation entre les règles du code de l’entrée et du séjour des étrangers et celles du code du travail. L’analyse de cette décision permet d’étudier la reconnaissance d’une dispense d’autorisation de travail avant d’envisager la censure de l’erreur commise par l’autorité préfectorale.
L’intéressé est entré sur le territoire national en 2017 et a bénéficié de plusieurs autorisations provisoires de séjour en raison de son état de santé personnel. Il a sollicité le renouvellement de son droit au séjour en 2022 tout en exerçant une activité professionnelle sous contrat de travail à durée indéterminée. L’autorité administrative a rejeté sa demande le 7 novembre 2023 en assortissant ce refus d’une obligation de quitter le territoire français dans un délai déterminé.
Le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande d’annulation de cet arrêté par un jugement rendu en audience publique le 19 mars de l’année 2024. Le requérant soutient devant les juges d’appel que l’administration a commis une erreur de droit en exigeant la production d’une autorisation de travail pour son emploi. L’intéressé a par ailleurs sollicité un sursis à l’exécution du jugement de première instance dans l’attente de la décision définitive de la juridiction d’appel.
La juridiction doit déterminer si la possession d’un document provisoire de séjour autorisant le travail dispense l’étranger de produire une autorisation spécifique lors de sa demande. La Cour administrative d’appel de Toulouse juge que l’exigence de l’administration est illégale car elle méconnaît les dispositions dérogatoires prévues par le code du travail. L’étude de cette décision porte sur la reconnaissance d’une dispense d’autorisation de travail avant d’analyser la censure de l’erreur commise par l’autorité administrative.
I. L’affirmation d’une dispense d’autorisation de travail
A. La faculté d’examen d’office des différents fondements du séjour
L’administration n’est pas tenue d’examiner d’office si un ressortissant étranger peut prétendre à un titre de séjour sur un fondement différent de sa requête initiale. Elle conserve néanmoins la faculté de procéder à cet examen de sa propre initiative afin de régulariser la situation administrative de l’intéressé présent sur le territoire. La Cour souligne qu’en l’espèce, le représentant de l’État a effectivement choisi d’apprécier le droit au séjour au titre de l’activité professionnelle exercée par le salarié.
B. L’opposabilité des dispenses prévues par le code du travail
L’article L. 421-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers subordonne la délivrance du titre salarié à la détention préalable d’une autorisation de travail valide. Le code du travail prévoit cependant des exceptions notables pour les titulaires d’un document provisoire de séjour portant la mention autorisant expressément son détenteur à travailler. Cette dispense, prévue à l’article R. 5221-2, permet à l’étranger de ne pas solliciter de nouvelle autorisation administrative spécifique pour exercer légalement ses propres fonctions contractuelles. Cette conformité aux règles de dispense conduit mécaniquement à la remise en cause de la légalité de la décision administrative contestée.
II. La censure d’un refus de séjour entaché d’illégalité
A. La caractérisation d’une erreur de droit administrative
L’arrêt attaqué repose sur le constat que le requérant disposait d’un récépissé de demande de renouvellement l’autorisant à travailler à la date de la décision préfectorale. L’autorité administrative a pourtant rejeté la demande au motif erroné que l’intéressé ne justifiait pas de la détention préalable d’une autorisation de travail obtenue auprès des services. Les juges d’appel considèrent que « le préfet a entaché sa décision d’une erreur de droit » en ignorant les mécanismes de dispense prévus par la réglementation en vigueur. Cette erreur fondamentale justifie l’annulation totale des mesures d’éloignement qui complétaient le refus de séjour initialement opposé par l’autorité administrative.
B. L’annulation de la décision et ses conséquences juridiques
L’annulation de la décision portant refus de séjour entraîne par voie de conséquence celle de l’obligation de quitter le territoire français ainsi que de la décision de renvoi. La Cour ordonne au représentant de l’État de procéder à un nouvel examen de la situation administrative de l’intéressé dans un délai de deux mois fermes. Cette solution rappelle la nécessité pour l’administration de prendre en compte l’ensemble des documents provisoires sécurisant le parcours professionnel des travailleurs étrangers présents en France.