Cour d’appel administrative de Versailles, le 10 juillet 2025, n°24VE01316

La cour administrative d’appel de Versailles, le 10 juillet 2025, s’est prononcée sur la légalité d’une mesure d’éloignement visant un ressortissant étranger. L’intéressé contestait une obligation de quitter le territoire sans délai assortie d’une interdiction de retour de deux ans vers la Turquie. Bien que père de deux enfants français, le requérant n’avait pas obtenu l’annulation de cet arrêté devant le tribunal administratif d’Orléans. La juridiction d’appel devait déterminer si l’atteinte portée à la vie privée demeurait proportionnée malgré la présence de liens familiaux en France. Les juges ont considéré que l’absence de preuves matérielles et le comportement du demandeur justifiaient le maintien de la décision administrative. Cette analyse conduit à examiner d’abord l’appréciation rigoureuse de la réalité des liens familiaux avant d’étudier la validation des mesures de contrainte.

I. Une appréciation rigoureuse de la réalité et de la stabilité des liens familiaux

A. L’exigence d’une contribution effective à l’entretien et à l’éducation des enfants

Le juge administratif subordonne le respect de la vie familiale à la démonstration d’un lien effectif entre le parent et ses enfants. La cour relève que le requérant « ne justifie pas contribuer à l’entretien de ses deux enfants » par la simple production de justificatifs. La reconnaissance de filière ne suffit pas à paralyser une mesure d’éloignement sans une implication matérielle et morale concrète au quotidien. La protection de l’intérêt supérieur de l’enfant exige une présence effective que les pièces du dossier ne permettaient pas d’établir avec certitude.

B. L’incidence de l’instabilité du foyer et des déclarations du requérant sur le droit au séjour

La stabilité du lien matrimonial constitue un élément déterminant pour apprécier l’existence d’une vie familiale normale au sens de la convention européenne. L’arrêt précise que l’intéressé ne justifie pas « résider de façon stable et continue avec sa compagne » suite à des violences conjugales. Les propos tenus devant les services de police, manifestant son souhait d’abandonner sa famille, ont pesé dans l’appréciation souveraine des faits. Le juge écarte toute méconnaissance du droit au séjour en soulignant l’absence d’intégration sociale ou professionnelle particulière sur le sol national. Ce constat d’une situation familiale précaire permet alors de valider les mesures de contrainte édictées par l’autorité administrative.

II. La validation des mesures de contrainte face au risque de soustraction à l’éloignement

A. La légitimité du refus de délai de départ volontaire fondé sur le risque de fuite

L’administration peut refuser un délai pour quitter volontairement le territoire lorsqu’il existe une probabilité sérieuse que l’étranger se soustraie à l’éloignement. Le risque de fuite est établi si l’individu s’est déjà maintenu irrégulièrement malgré deux précédentes mesures prises par l’autorité préfectorale. Le requérant n’avait pas exécuté ces injonctions antérieures, caractérisant ainsi une volonté délibérée de faire échec au droit du séjour des étrangers. Le refus de délai apparaît comme une conséquence logique du comportement passé du ressortissant face aux décisions administratives devenues définitives.

B. La proportionnalité de l’interdiction de retour au regard du mépris des décisions antérieures

Le prononcé d’une interdiction de retour sur le territoire français doit faire l’objet d’une motivation prenant en compte la durée de présence. La cour valide la durée de deux ans en estimant que le mépris des mesures précédentes constitue un critère de sévérité légitime. L’autorité compétente a examiné « la nature et l’ancienneté de ses liens avec la France » avant de fixer cette sanction administrative. Les magistrats refusent de voir une erreur manifeste d’appréciation, compte tenu de la faiblesse des attaches réelles démontrées durant l’instruction.

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Hassan KOHEN
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