Cour d’appel administrative de Versailles, le 10 juillet 2025, n°24VE02937

La Cour administrative d’appel de Versailles a rendu le 10 juillet 2025 un arrêt précisant les règles de compétence territoriale d’une autorité préfectorale. Un ressortissant étranger avait sollicité le renouvellement de son titre de séjour étudiant auprès des services administratifs de son lieu de résidence habituel. L’autorité administrative a rejeté cette demande par un arrêté portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français le 15 avril 2024. L’intéressé avait pourtant informé les services de l’État de son changement de domicile vers un autre département quelques mois avant l’édiction de l’acte. Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté la demande d’annulation de ces décisions par un jugement rendu le 10 octobre 2024. Le requérant a interjeté appel devant la juridiction supérieure afin d’obtenir l’annulation de l’arrêté pour incompétence territoriale de son signataire. La juridiction devait déterminer si un préfet restait compétent pour statuer sur une demande après avoir été informé du déménagement définitif du pétitionnaire. La cour considère que l’autorité administrative n’était plus compétente territorialement pour se prononcer sur la demande de renouvellement du titre de séjour. Cet arrêt annule le jugement ainsi que les décisions litigieuses en raison de l’irrégularité juridique constatée dans la procédure. L’analyse de cette décision impose d’étudier la fixation de la compétence préfectorale avant d’examiner les conséquences juridiques de son inobservation.

I. La fixation de la compétence préfectorale par le lieu de résidence

A. Le critère textuel du domicile effectif

L’article R. 311-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile fonde la compétence du préfet du département. La disposition prévoit expressément que « le titre de séjour est délivré par le préfet du département dans lequel l’étranger a sa résidence ». La détermination de l’autorité compétente s’apprécie ainsi au regard de la situation géographique réelle du demandeur au moment où l’acte est édicté. Le juge administratif vérifie si le signataire de l’acte dispose toujours d’un lien territorial avec le ressortissant étranger lors de la signature. Cette règle garantit que l’administration de proximité traite les dossiers des personnes résidant effectivement sous sa juridiction directe pour une meilleure instruction.

B. L’incidence de l’information préalable de l’administration

Le requérant justifiait avoir informé les services compétents de son changement d’école et de domicile par plusieurs échanges de courriels particulièrement explicites. Il avait également tenté de déposer les nouveaux justificatifs sur le site internet dédié sans obtenir de succès technique auprès de la plateforme numérique. La cour relève qu’il ressort des pièces du dossier que l’intéressé avait quitté le département initial pour se domicilier dans une autre localité. L’administration avait été « dûment informée » de cette nouvelle situation géographique au plus tard deux mois avant l’intervention de la décision de refus. L’autorité préfectorale ne pouvait donc plus ignorer son incompétence territoriale au moment où elle a choisi de rejeter la demande de titre. Le constat de l’incompétence territoriale de l’autorité administrative entraîne l’annulation des actes litigieux ainsi que le réexamen de la situation du demandeur.

II. Les conséquences juridiques de l’incompétence territoriale

A. L’annulation impérative du refus de séjour

L’incompétence de l’auteur de l’acte constitue un vice de légalité externe que le juge administratif doit sanctionner dès lors qu’il est établi. La juridiction affirme que l’autorité préfectorale d’origine « n’était plus compétent territorialement pour se prononcer sur sa demande de renouvellement » de titre de séjour. Le respect de ces règles de compétence assure aux administrés une instruction de leur dossier par les services réellement compétents pour leur secteur. Cette solution jurisprudentielle protège le droit des étrangers à voir leur situation évaluée par l’autorité préfectorale responsable de leur nouveau lieu de vie. L’annulation de la décision de refus s’impose ainsi comme la conséquence directe de l’absence de pouvoir juridique de son auteur signataire.

B. L’effet de l’annulation sur les mesures accessoires

L’annulation du refus de titre de séjour entraîne nécessairement celle de l’obligation de quitter le territoire français par un effet de voie de conséquence. Le juge ordonne alors au préfet territorialement compétent de procéder au réexamen de la situation administrative de l’intéressé dans un délai de deux mois. L’arrêt prévoit également la délivrance immédiate d’une autorisation provisoire de séjour permettant au ressortissant de travailler durant la période nécessaire à ce réexamen. La cour écarte toutefois le prononcé d’une astreinte financière en considérant que l’injonction de réexamen suffit à assurer la pleine exécution du présent arrêt. Le rétablissement de la légalité impose désormais une reprise complète de la procédure d’instruction par les services administratifs territorialement responsables du dossier.

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Hassan KOHEN
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