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La procédure de traitement des situations de surendettement des particuliers, instituée par le code de la consommation, confère au juge un pouvoir de contrôle étendu sur les mesures arrêtées par la commission de surendettement. Cette faculté de révision se manifeste pleinement lorsque le débiteur conteste les modalités du plan de remboursement imposé, notamment quant au montant des mensualités fixées.
Un débiteur a déposé le 1er août 2023 une demande auprès de la commission de surendettement aux fins d’ouverture d’une procédure de traitement de sa situation. La commission a déclaré cette demande recevable le 10 août 2023, puis a imposé le 12 octobre 2023 un rééchelonnement des dettes sur une durée de 74 mois avec un taux d’intérêt maximum de 4,22 %. Le débiteur a formé un recours contre ces mesures. Par jugement du 24 septembre 2024, le tribunal de proximité de Saint-Avold a fixé le passif à hauteur de 53 164,17 euros et arrêté un plan de remboursement sur 84 mois avec des mensualités de 632,89 euros et un taux d’intérêt ramené à zéro. Le débiteur a interjeté appel de cette décision le 8 octobre 2024, sollicitant une réduction des mensualités à 400 euros eu égard à sa situation.
La cour d’appel de Metz devait déterminer si les mensualités de remboursement fixées par le premier juge respectaient les critères légaux de détermination de la capacité contributive du débiteur surendetté.
Par arrêt du 11 septembre 2025, la cour d’appel de Metz confirme le jugement en toutes ses dispositions. Elle retient que la situation financière de l’appelant lui permet d’honorer les mensualités fixées à 632,89 euros, ce montant demeurant inférieur à la quotité saisissable.
Cette décision illustre la méthode de détermination de la capacité de remboursement du débiteur surendetté (I) et consacre la prééminence du critère légal de la quotité saisissable dans l’appréciation du plan (II).
I. La méthode de détermination de la capacité de remboursement du débiteur surendetté
La cour d’appel procède à une analyse actualisée des ressources du débiteur (A) avant d’évaluer ses charges selon les critères réglementaires (B).
A. L’actualisation des ressources à la date de la décision
La cour rappelle un principe fondamental du contentieux du surendettement : « Le juge doit prendre en considération la situation du débiteur à la date à laquelle il statue et déterminer la part des revenus qu’il peut affecter au paiement de ses dettes, en prenant en compte l’évolution prévisible des dits revenus. » Cette règle impose au magistrat de ne pas figer son appréciation aux données existant lors de la saisine de la commission ou du prononcé du jugement de première instance.
En l’espèce, la cour constate que la rémunération de l’appelant a augmenté depuis le jugement déféré. Elle relève qu’au cours de l’année 2024, celui-ci a perçu une rémunération nette imposable de 38 010,52 euros, soit un salaire mensuel net moyen de 3 167,54 euros. Elle observe également que cette progression se confirme sur les quatre premiers mois de 2025 avec une moyenne mensuelle nette de 3 395,40 euros.
La cour intègre par ailleurs aux ressources du débiteur la contribution de sa compagne aux charges courantes du logement. Elle précise que ce calcul s’effectue « au prorata des ressources respectives » et retient une somme de 473 euros. Les ressources mensuelles totales sont ainsi fixées à 3 640,54 euros. Cette méthode traduit une approche réaliste de la situation économique du ménage, sans pour autant confondre les patrimoines des concubins ni étendre la procédure à la compagne non concernée par le surendettement.
B. L’évaluation des charges selon les critères réglementaires
L’article R.731-3 du code de la consommation offre à la commission et au juge une alternative pour apprécier les dépenses courantes du ménage. La cour rappelle que ces charges peuvent être retenues « soit pour leur montant réel sur la base des éléments déclarés par le débiteur, soit en fonction du barème fixé par son règlement intérieur ».
La cour procède à une analyse détaillée des charges, en combinant les pièces produites et le barème de la commission relatif au budget vie courante pour l’année 2024. Elle prend en compte la composition du foyer, à savoir l’appelant, sa compagne et la fille de celle-ci, ainsi que l’exercice d’un droit de visite et d’hébergement sur trois enfants un week-end sur deux.
Les charges retenues s’élèvent à 2 635,68 euros mensuels. Elles comprennent notamment les dépenses courantes d’alimentation, d’habillement, d’hygiène et ménagères pour 625 euros, le loyer de 775 euros, les dépenses inhérentes à l’habitation pour 202 euros, les frais de chauffage pour 207 euros, la pension alimentaire de 300 euros, les frais de cantine de 127 euros, un forfait enfant de 150 euros et les frais de déplacement professionnel de 100 euros. La cour retient également l’impôt sur le revenu à hauteur de 149,68 euros. Cette évaluation rigoureuse garantit la préservation d’un minimum vital conforme aux exigences de l’article L.731-2 du code de la consommation.
II. La prééminence du critère de la quotité saisissable dans l’appréciation du plan
La cour confirme le cadre légal de référence pour fixer les remboursements (A) et rejette la demande de réduction des mensualités en conséquence (B).
A. Le cadre légal de référence pour la fixation des remboursements
L’article L.731-1 du code de la consommation constitue le fondement de la détermination de la capacité contributive du débiteur surendetté. La cour le cite expressément : « le montant des remboursements est fixé dans des conditions précisées par décret en Conseil d’État par référence à la quotité saisissable du salaire tel qu’elle résulte des articles L.3252-2 et L.3252-3 du code du travail de manière à ce que la part des ressources nécessaires aux dépenses courantes du ménage lui soit réservée par priorité ».
Ce mécanisme de référence à la quotité saisissable présente une double finalité. Il protège le débiteur en lui garantissant la conservation d’un minimum vital. Il assure parallèlement aux créanciers un remboursement effectif dans la limite des capacités réelles du débiteur. L’article L.731-2 précise que cette part réservée ne peut être inférieure au montant forfaitaire du revenu de solidarité active et doit intégrer les dépenses essentielles de logement, d’énergie, de nourriture, de scolarité, de garde, de déplacement professionnel et de santé.
La cour calcule la différence entre les revenus et les charges, soit 1 004,86 euros. Ce montant représente la capacité de remboursement théorique du débiteur. Elle constate que les mensualités fixées par le premier juge à 632,89 euros demeurent inférieures à cette somme et a fortiori à la quotité saisissable applicable.
B. Le rejet de la demande de réduction des mensualités
L’appelant sollicitait une réduction des mensualités à 400 euros en invoquant sa situation personnelle. La cour rejette cette prétention en constatant que « la situation financière de l’appelant lui permet d’honorer les mensualités du plan fixées par le premier juge de 632,89 euros ». Elle ajoute que ces mensualités sont « d’un montant inférieur à la quotité saisissable alors que selon les dispositions légales précitées le montant des remboursements est fixé en s’y référant ».
Cette motivation révèle que la demande de réduction ne peut prospérer dès lors que les mensualités n’excèdent pas le seuil légal de référence. Le débiteur ne saurait obtenir un traitement plus favorable que celui résultant de l’application des textes, sauf à démontrer que sa situation présente des particularités justifiant une dérogation. Or la cour relève au contraire une amélioration de ses revenus depuis le jugement de première instance.
La portée de cet arrêt réside dans l’affirmation selon laquelle le juge du surendettement ne dispose pas d’un pouvoir discrétionnaire dans la fixation des mensualités. Il doit se référer aux critères légaux et réglementaires. Le débiteur qui conteste le montant des remboursements imposés doit établir que ceux-ci excèdent sa capacité contributive telle qu’elle résulte de l’application de ces critères. La simple invocation d’une situation difficile ne suffit pas lorsque le calcul objectif démontre une marge de remboursement disponible. Cette solution préserve l’équilibre entre la protection du débiteur et les droits des créanciers, conformément à la philosophie du droit du surendettement.