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L’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris en audience solennelle le 11 septembre 2025 illustre le fonctionnement du désistement d’appel en matière ordinale. Un avocat inscrit au barreau de Paris avait fait l’objet d’une décision d’omission du tableau prononcée par le conseil de l’ordre le 18 novembre 2024. Cette omission reposait sur le non-paiement de cotisations ordinales, d’assurances et de contributions au conseil national des barreaux. L’intéressé avait formé un recours le 24 décembre 2024.
Lors de l’audience du 19 juin 2025, l’appelant a déclaré se désister de son appel, ayant entre-temps régularisé sa situation financière. Le conseil de l’ordre, le bâtonnier en qualité de représentant de l’ordre et le ministère public ont tous sollicité qu’il soit donné acte de ce désistement. La cour devait déterminer si les conditions du désistement d’appel étaient réunies et quelles conséquences en tirer.
La cour d’appel de Paris a constaté le désistement d’instance, prononcé son dessaisissement et laissé les dépens à la charge de l’appelant. Elle a fondé sa décision sur les articles 400 et suivants du code de procédure civile, rappelant que le désistement d’appel est admis en toutes matières et n’a besoin d’être accepté que s’il contient des réserves ou si un appel incident a été formé.
Cet arrêt, bien que rendu dans un contentieux ordinal, offre l’occasion d’examiner le régime du désistement d’appel et ses effets spécifiques (I), avant d’analyser les particularités de son application au contentieux de l’omission du tableau (II).
I. Le régime du désistement d’appel et son application procédurale
A. Les conditions d’admission du désistement unilatéral
La cour d’appel de Paris rappelle le principe posé par les articles 400 et suivants du code de procédure civile. Elle énonce que « le désistement de l’appel est admis en toutes matières, sauf disposition contraire ». Cette formulation souligne le caractère libéral du droit français à l’égard de la renonciation à un recours. L’appelant demeure maître de son action et peut y mettre fin de sa propre initiative.
La décision précise également les hypothèses dans lesquelles l’acceptation de l’intimé devient nécessaire. Le désistement « n’a besoin d’être accepté que s’il contient des réserves ou si un appel incident a été formé ou une demande incidente ». En l’espèce, aucune de ces circonstances n’était présente. Le conseil de l’ordre, le bâtonnier et le ministère public ont d’ailleurs expressément sollicité qu’il soit donné acte du désistement. Cette unanimité des parties présentes confirmait l’absence de tout obstacle à la constatation du désistement.
La cour a également visé les articles 468, 937 et 946 du code de procédure civile, relatifs à la procédure sans représentation obligatoire. Ces textes permettent aux parties de présenter des observations orales sans conclusions écrites préalables. L’appelant comparaissait en personne, ce qui est usuel devant la cour d’appel statuant en matière de décisions ordinales. Le formalisme allégé de cette procédure facilite la déclaration de désistement à l’audience même.
B. Les effets attachés au désistement d’appel
La cour énonce que le désistement « emporte acquiescement à la décision ». Cet effet est prévu par l’article 403 du code de procédure civile. L’appelant qui se désiste renonce non seulement à son recours mais accepte également la décision attaquée. Celle-ci acquiert force de chose jugée. L’omission du tableau prononcée le 18 novembre 2024 devient donc définitive sur le plan procédural.
Cette conséquence mérite attention. L’arrêt indique que l’intéressé avait « réglé les causes de son omission financière ». La régularisation de la dette ordinale ne fait pas disparaître l’omission prononcée. Elle constitue simplement le préalable à une éventuelle demande de réinscription au tableau. L’avocat omis devra solliciter sa réinscription selon les formes prévues par le décret du 27 novembre 1991 et le règlement intérieur du barreau.
La cour prononce également son dessaisissement et laisse les dépens à la charge de l’appelant. Cette répartition des dépens est conforme à l’article 399 du code de procédure civile. Le désistant supporte les frais de l’instance qu’il a engagée puis abandonnée. La solution est classique et ne soulève aucune difficulté particulière.
II. Les particularités du contentieux ordinal et la portée de la décision
A. Le cadre juridique de l’omission financière du tableau
L’omission du tableau constitue une mesure administrative prononcée par le conseil de l’ordre. Elle sanctionne le manquement de l’avocat à ses obligations professionnelles, notamment le paiement des cotisations. La décision du 18 novembre 2024 visait les articles 105 2° et 3° du décret du 27 novembre 1991 ainsi que les dispositions P73.1.1 et P73.1.2 du règlement intérieur du barreau de Paris. Ces textes organisent l’omission pour défaut de paiement des charges ordinales.
L’omission se distingue de la radiation disciplinaire. Elle n’implique pas de faute professionnelle au sens déontologique. Elle constate simplement que l’avocat ne remplit plus les conditions nécessaires à son maintien au tableau. Le défaut de paiement des cotisations révèle une impossibilité de faire face aux charges de la profession. L’omission protège ainsi les intérêts du barreau et des justiciables.
Le recours contre cette décision s’exerce devant la cour d’appel statuant en audience solennelle, composée de cinq magistrats. Cette formation renforcée témoigne de l’importance attachée aux décisions affectant l’exercice de la profession d’avocat. Le ministère public est partie jointe et présente ses observations. Ce cadre procédural solennel encadre strictement le contrôle juridictionnel des décisions ordinales.
B. La portée limitée de l’arrêt et ses enseignements pratiques
L’arrêt commenté se borne à constater un désistement. Il ne tranche aucune question de fond relative aux conditions de l’omission ou à sa régularité. La cour n’a pas eu à examiner si le conseil de l’ordre avait correctement appliqué les textes en vigueur. Le désistement a privé la juridiction de tout pouvoir d’appréciation sur le bien-fondé de la décision attaquée.
Cette situation est fréquente en pratique. L’avocat omis pour motif financier régularise sa situation pendant l’instance d’appel. Il se désiste alors pour solliciter directement sa réinscription auprès du conseil de l’ordre. Cette stratégie évite une décision juridictionnelle confirmant l’omission sur le fond. Elle permet également de gagner du temps dans le processus de réinscription.
L’arrêt rappelle néanmoins que le désistement emporte acquiescement. L’omission devient définitive même si ses causes ont disparu. L’intéressé ne pourra pas ultérieurement contester la régularité de cette décision. Ce point mérite d’être souligné car il conditionne les droits de l’avocat. La réinscription au tableau constitue une nouvelle demande, soumise à l’appréciation du conseil de l’ordre. Elle n’est pas un droit automatique découlant du seul paiement des arriérés.