L’arrêt rendu par la Cour de justice de l’Union européenne le 19 décembre 2013 définit les règles de compétence en matière de dessins ou modèles. En l’espèce, une entreprise a introduit une action en constatation de non-contrefaçon devant un juge national contre une société concurrente. Le demandeur souhaitait également exclure tout abus de position dominante ou acte de concurrence déloyale dans ce litige commercial. Le défendeur a contesté la compétence du juge saisi puis a présenté des moyens de défense au fond de manière subsidiaire. Le tribunal de Düsseldorf a saisi la Cour d’une demande de décision préjudicielle concernant l’interprétation des règlements européens. La question portait sur l’usage du for du lieu du dommage pour une action en constatation de non-contrefaçon de modèle. La Cour décide que « la règle de compétence énoncée à l’article 5, point 3, du règlement n o 44/2001 ne s’applique pas ». L’étude de la concentration des litiges au domicile du défendeur précédera celle de la cohérence globale du système de compétence européen.
**I. L’EXCLUSION DU FOR DÉLICTUEL POUR LES ACTIONS NÉGATIVES**
**A. La concentration du contentieux au domicile du défendeur**
La Cour rappelle que les actions en constatation de non-contrefaçon doivent être portées devant les tribunaux de l’État du domicile du défendeur. Par conséquent, cette solution garantit une prévisibilité forte pour les parties lors de la détermination de la juridiction compétente dans l’Union européenne. Elle affirme que « les actions en constatation de non-contrefaçon visées à l’article 81, sous b), de ce règlement doivent être portées devant les tribunaux du défendeur ». Le juge européen privilégie ainsi la règle générale de compétence territoriale au détriment des options de for alternatives souvent utilisées en matière délictuelle.
**B. Le rejet de la compétence spéciale du lieu du dommage**
L’article 5 point 3 du règlement 44/2001 permet normalement de saisir le juge du lieu où le fait dommageable s’est produit. Cependant, la Cour juge que cette règle ne s’applique pas aux actions visant à faire constater l’absence de violation d’un droit. Elle souligne que « la règle de compétence énoncée à l’article 5, point 3 ne s’applique pas aux actions en constatation de non‑contrefaçon ». L’absence de dommage actuel dans ces procédures justifie l’écartement de ce critère de rattachement spécifique lié à la nature du délit. La protection des droits de la défense complète cette approche restrictive des compétences dérogatoires prévues par les textes communautaires.
**II. LA PRÉSERVATION DE LA COHÉRENCE DES RÈGLES DE COMPÉTENCE**
**A. L’absence de prorogation tacite par une défense subsidiaire**
Le défendeur peut soulever l’incompétence du juge saisi sans que cela soit interprété comme une acceptation tacite de sa compétence légale. De plus, cette faculté reste ouverte même si l’exception d’incompétence est présentée à titre subsidiaire par rapport à d’autres moyens de défense. La Cour précise qu’une telle exception « ne saurait être considérée comme une acceptation de la compétence du juge saisi » par la partie. Cette interprétation protège efficacement le droit des justiciables de ne pas être attraits devant une juridiction incompétente contre leur volonté manifeste.
**B. L’attraction des demandes connexes par l’action principale**
L’inapplicabilité de la règle de compétence délictuelle s’étend aux demandes de constatation d’abus de position dominante ou de concurrence déloyale. En effet, ces demandes connexes suivent le sort de l’action principale dès lors qu’elles reposent sur le même fondement de non-contrefaçon. La Cour considère que « faire droit à ces demandes présuppose d’accueillir cette action en constatation de non-contrefaçon » au préalable. L’unité du litige impose alors un regroupement des prétentions devant la juridiction compétente pour statuer sur le droit de propriété intellectuelle.