Cour de justice de l’Union européenne, le 15 juin 2023, n°C-292/22

La Cour de justice de l’Union européenne a rendu une décision le 9 novembre 2023 relative au classement tarifaire de l’huile de palme. Une société importatrice a déclaré des marchandises comme de l’huile de palme raffinée au terminal portuaire de Varna Ouest en provenance de Turquie. Le laboratoire central des douanes a ultérieurement identifié le produit comme étant du shortening d’huile de palme obtenu par un procédé de texturation. L’administration a alors décidé de reclasser la marchandise sous une position tarifaire soumise à un taux de droits de douane plus élevé. Le tribunal d’arrondissement de Devnia a rendu un jugement le 3 décembre 2021 annulant la sanction pécuniaire infligée lors de ce reclassement douanier. Le tribunal administratif de Varna a ensuite saisi la Cour pour interpréter les critères de distinction entre les positions de la nomenclature combinée. L’importateur soutient que l’absence de modification chimique impose le maintien du classement initial tandis que l’administration invoque la modification structurelle physique. Le problème juridique porte sur l’influence d’un traitement physique de texturation sans modification chimique sur la qualification tarifaire d’une marchandise importée. La Cour estime qu’une préparation ayant subi un traitement de texturation relève de la position 1517 même sans aucune modification chimique associée. Le commentaire analysera d’abord la primauté du traitement technologique sur la composition chimique avant d’étudier l’encadrement des modalités de preuve par les autorités nationales.

I. La prépondérance du traitement technologique sur la composition chimique du produit

A. L’indifférence de la stabilité chimique dans la qualification tarifaire du produit

L’importateur soutenait que l’absence de modification chimique de la matière grasse imposait son maintien sous la position tarifaire initiale la plus avantageuse. La Cour rejette cet argument en précisant que « la question de savoir si cette préparation a été chimiquement modifiée en raison de ce traitement étant sans pertinence à cet égard ». Le classement dépend ainsi des caractéristiques objectives du produit telles qu’elles résultent des manipulations physiques effectuées lors de sa fabrication industrielle. Dès lors, la position 1511 ne couvre que les huiles n’ayant subi aucune transformation supplémentaire modifiant la structure naturelle ou physique de la matière.

B. La texturation comme critère de basculement vers la catégorie des préparations alimentaires

Le procédé de texturation modifie la structure cristalline de l’huile de palme pour lui donner la consistance nécessaire aux usages alimentaires spécifiques recherchés. La Cour rappelle que « relève de la position 1517 une préparation alimentaire d’huile de palme ne relevant pas de la position 1516 […] et ayant subi un traitement autre que le raffinage ». Cette transformation transforme l’huile brute en un produit dont les propriétés physiques diffèrent fondamentalement de celles d’une matière grasse simplement raffinée. La reconnaissance du critère technique comme fondement du classement tarifaire soulève la question des moyens de preuve admissibles devant les juridictions nationales.

II. L’encadrement des modalités de preuve en matière de caractéristiques physiques

A. La reconnaissance de l’autonomie méthodologique des administrations douanières nationales

En l’absence de critères définis dans la nomenclature européenne, les autorités douanières « peuvent choisir la méthode appropriée à cet effet » pour analyser la marchandise. Cette liberté permet aux administrations d’adapter leurs techniques d’investigation aux évolutions technologiques des procédés de fabrication utilisés par les divers exportateurs mondiaux. Le recours à des protocoles scientifiques autonomes est validé dès lors qu’ils offrent des garanties suffisantes de fiabilité lors du contrôle des importations.

B. L’exigence de conformité des résultats aux objectifs de la nomenclature européenne

Le choix d’une méthode d’analyse reste soumis à l’obligation d’obtenir des résultats conformes aux exigences de sécurité juridique de la nomenclature combinée européenne. Le juge national doit vérifier que la procédure employée permet d’identifier précisément les caractéristiques physiques essentielles au classement du produit importé. La preuve de la texturation doit ainsi résulter d’une évaluation technique rigoureuse garantissant une application uniforme du tarif douanier commun sur tout le territoire.

📄 Circulaire officielle

Nos données proviennent de la Cour de cassation (Judilibre), du Conseil d'État, de la DILA, de la Cour de justice de l'Union européenne ainsi que de la Cour européenne des droits de l'Homme.
Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

Maître Kohen, avocat à Paris en droit pénal et droit du travail, accompagne ses clients avec rigueur et discrétion dans toutes leurs démarches juridiques, qu'il s'agisse de procédures pénales ou de litiges liés au droit du travail.

En savoir plus sur Kohen Avocats

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Poursuivre la lecture