Cour de justice de l’Union européenne, le 16 novembre 2023, n°C-283/22

La Cour de justice de l’Union européenne, par un arrêt rendu le 6 octobre 2025, précise l’application du droit international et européen au transport par hélicoptère. Un membre d’un corps de secours est décédé lors d’un exercice d’entraînement spécialisé réalisé dans le périmètre militaire d’un aéroport national. La victime se trouvait alors suspendue à un treuil relié à un appareil exploité par les services de police avant que survienne l’accident mortel. Les ayants-droits ont engagé une action en responsabilité afin d’obtenir l’indemnisation du préjudice subi sur le fondement de la réglementation aéronautique internationale. La juridiction saisie a interrogé la Cour sur l’applicabilité de la Convention de Montréal et du règlement européen relatif aux exigences d’assurance des exploitants. La question posée est de savoir si une opération de formation par héliportage de police constitue un transport ouvrant droit à indemnisation conventionnelle. La Cour juge que cette situation ne constitue ni un transport international ni un transport étatique et exclut l’application du régime d’assurance obligatoire.

I. L’exclusion du régime de responsabilité de la Convention de Montréal

A. L’absence de qualification de transport au sens conventionnel

La Convention de Montréal régit exclusivement les situations de « transport international » impliquant un déplacement entre des points situés sur le territoire d’États parties. La Cour souligne que l’article 17 ne saurait être invoqué dès lors que l’activité litigieuse s’inscrit dans un cadre strictement opérationnel de formation. L’exercice de treuillage effectué au-dessus d’une zone militaire aéroportuaire ne répond pas aux critères juridiques d’un contrat de transport de passagers. La juridiction précise qu’il ne s’agit pas d’un transport au sens de l’article 1er car l’intention des parties ne porte pas sur un voyage. Cette interprétation stricte écarte la responsabilité de l’exploitant pour des dommages survenus lors d’activités qui ne visent pas le déplacement d’un point à un autre.

B. L’inapplicabilité des dispositions relatives au transport effectué par l’État

L’article 2 de la Convention de Montréal envisage le transport effectué par l’État dans des conditions exceptionnelles mais exige toujours l’existence d’un service de transport. L’utilisation d’un hélicoptère pour un entraînement technique ne peut être assimilée à une mission de transport public ou privé de personnes. Les juges considèrent que la situation ne saurait être qualifiée de « transport effectué par l’État » au sens des dispositions conventionnelles invoquées par les requérants. Ce raisonnement préserve la spécificité des missions de service public qui ne relèvent pas du transport commercial même si elles impliquent un aéronef. La décision confirme que le droit à indemnisation des ayants-droits est conditionné par la nature intrinsèque de l’activité de vol.

II. L’inexistence d’une obligation d’indemnisation fondée sur le droit européen

A. Le statut spécifique de l’hélicoptère en tant qu’aéronef d’État

Le règlement européen 785/2004 exclut de son champ d’application les vols effectués par des « aéronefs d’État » comme ceux des services de police ou de douane. La Cour constate que l’appareil impliqué dans l’accident était exploité par les forces de sécurité intérieure pour les besoins d’une formation de sauvetage. Cette qualification juridique emporte l’éviction automatique des règles relatives à l’assurance minimale obligatoire protégeant habituellement les passagers des transporteurs aériens classiques. L’appareil de police ne peut être considéré comme un aéronef civil soumis aux exigences de couverture financière prévues pour la protection des usagers. L’exclusion textuelle est interprétée de manière rigoureuse afin de respecter la souveraineté des États membres sur leurs propres moyens aériens régaliens.

B. L’impossibilité d’actionner les garanties d’assurance du règlement communautaire

Les dispositions combinées du droit de l’Union ne permettent pas de « fonder un droit à indemnisation au bénéfice des ayants‑droits » dans une telle configuration. Le décès survenu lors d’un exercice avec un moyen étatique relève des régimes de responsabilité administrative nationale plutôt que du droit uniforme européen. La protection offerte par le règlement sur l’assurance des exploitants ne s’étend pas aux victimes d’accidents survenus lors de missions de sécurité. Les ayants-droits ne peuvent donc pas se prévaloir de ces textes pour contourner l’absence de base légale spécifique applicable aux aéronefs publics. Cette solution consacre une rupture d’égalité apparente au profit d’une cohérence systémique entre les régimes de responsabilité internationale et les polices d’assurance.

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Hassan KOHEN
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Hassan Kohen

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