Cour de justice de l’Union européenne, le 17 décembre 2015, n°C-517/13

Par un arrêt rendu le 17 décembre 2015, la Cour de justice de l’Union européenne précise le régime fiscal des infrastructures de télécommunications mobiles. Cette décision interprète les limites imposées par le droit dérivé européen aux pouvoirs de taxation des autorités locales des États membres. Une société exploitant des pylônes de téléphonie conteste l’imposition de taxes annuelles sur ses installations par une autorité provinciale belge. Le tribunal de première instance de Namur, saisi du litige le 14 juin 2000, interroge la Cour sur la validité de ce prélèvement fiscal. La juridiction de renvoi cherche à savoir si les dispositions encadrant l’autorisation des réseaux s’opposent à une taxe sur les infrastructures physiques. La Cour juge que le droit de l’Union ne prohibe pas une telle taxe dès lors qu’elle ne grève pas la procédure d’autorisation.

**I. L’exclusion des taxes d’infrastructure du régime d’autorisation**

**A. L’absence d’incidence sur la procédure d’accès au marché**

L’article 6 de la directive prévoit que l’autorisation générale peut être soumise uniquement aux conditions limitativement énumérées dans son annexe technique. La Cour souligne que « le fait générateur de celle‑ci doit être lié à la procédure d’autorisation générale » pour entrer dans ce champ d’application spécifique. En l’espèce, la taxe litigieuse frappe la simple exploitation de pylônes ou d’unités d’émission sans constituer un préalable à l’exercice de l’activité. Les juges considèrent donc que ce prélèvement financier ne s’analyse pas comme une condition d’accès au marché des communications électroniques.

**B. La distinction entre prélèvement fiscal et redevance d’usage**

L’article 13 de la directive régit les redevances liées aux droits d’utilisation des radiofréquences ou de mise en place de ressources physiques. La jurisprudence précise que ce texte « ne vise pas toutes les redevances auxquelles sont soumises les infrastructures » permettant la fourniture de services numériques. La taxe provinciale ne présente pas les caractéristiques d’une contrepartie financière pour le droit d’occuper le domaine public ou privé. Le juge européen opère ainsi une distinction nette entre les redevances d’usage optimal des ressources et les impositions budgétaires générales.

**II. La préservation de la souveraineté fiscale des collectivités locales**

**A. Une interprétation rigoureuse des limitations législatives européennes**

Le raisonnement de la Cour repose sur une lecture littérale des dispositions prohibant les entraves pécuniaires injustifiées à la libre prestation de services. Cette interprétation stricte protège les prérogatives fiscales des collectivités territoriales tant que les mesures ne ciblent pas spécifiquement l’autorisation sectorielle. La cohérence de la solution est assurée par le refus d’étendre artificiellement le domaine des interdictions posées par la directive dite autorisation. L’approche retenue valide la légalité de prélèvements dont l’objectif demeure purement budgétaire et étranger à la régulation technique des réseaux.

**B. La portée pratique sur le financement des autorités décentralisées**

Cet arrêt de 2015 confirme une tendance jurisprudentielle permettant aux autorités décentralisées de maintenir des sources de revenus liées à l’occupation du territoire. La solution apporte une sécurité juridique bienvenue aux administrations locales confrontées aux contestations systématiques des opérateurs de réseaux mobiles. Elle limite toutefois la portée protectrice du droit européen aux seules charges directement rattachées aux procédures administratives d’octroi de licences. Les États membres conservent ainsi une marge de manœuvre fiscale importante pour imposer les infrastructures matérielles présentes sur leur sol national.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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