Cour de justice de l’Union européenne, le 17 janvier 2023, n°C-632/20

La Grande Chambre de la Cour de justice de l’Union européenne a rendu, le 17 janvier 2023, un arrêt fondamental relatif aux relations extérieures de l’Union. Un État membre contestait la validité d’une décision prise par une institution autorisant la participation d’une autorité de régulation étrangère à un organisme européen. Le Tribunal de l’Union européenne avait initialement rejeté le recours en annulation formé par cet État membre par une décision du 23 septembre 2020. Saisie d’un pourvoi, la Cour devait déterminer si une entité non reconnue comme un État souverain pouvait être qualifiée de pays tiers au sens du droit. L’appelant soutenait que l’institution avait méconnu la répartition des compétences et l’absence de personnalité juridique internationale de l’autorité tierce pour conclure des accords. La Cour juge que la notion de pays tiers ne se limite pas aux seuls États souverains mais sanctionne l’incompétence de l’institution pour agir.

I. La qualification autonome du pays tiers au regard du droit de l’Union

A. L’indépendance de la notion de pays tiers par rapport à la qualité d’État

La Cour précise d’emblée que « la notion de « pays tiers » […] n’est pas équivalente à celle d’ »État tiers » » au sens des traités européens. Cette interprétation autonome permet au droit de l’Union de s’appliquer à des entités territoriales distinctes sans préjuger de leur reconnaissance internationale officielle. Les juges soulignent que l’objectif de la coopération technique prime sur les considérations diplomatiques classiques liées à la souveraineté étatique des partenaires extérieurs.

B. La justification fonctionnelle d’une interprétation large des relations extérieures

L’approche retenue garantit l’efficacité des réseaux de communication européens en intégrant les autorités de régulation de l’ensemble de la zone géographique concernée. La Cour valide ainsi la possibilité pour un organisme de l’Union de collaborer avec des autorités administratives étrangères sans exiger une reconnaissance étatique. Cette souplesse conceptuelle sert les intérêts pratiques du marché intérieur tout en respectant le cadre législatif régissant les agences de régulation technique.

II. La sanction du non-respect de la répartition des compétences institutionnelles

A. L’incompétence de l’autorité pour établir unilatéralement des arrangements de travail

L’arrêt censure toutefois la démarche de l’institution qui a excédé ses pouvoirs en signant directement les arrangements de travail avec l’autorité étrangère. La Cour observe que le règlement applicable confère exclusivement cette compétence à l’organisme de régulation lui-même et non à l’autorité centrale de l’Union. L’institution a méconnu les compétences dévolues aux différents organes en se substituant indûment à la procédure de décision prévue par le législateur européen.

B. Le maintien temporaire des effets de la décision annulée pour des motifs de sécurité juridique

Afin d’éviter un vide juridique préjudiciable, les juges décident que les effets de l’acte annulé sont maintenus pendant une durée maximale de six mois. Cette mesure exceptionnelle assure la continuité des activités de régulation tout en laissant le temps nécessaire pour adopter une base juridique désormais régulière. La sécurité des relations entre les différents acteurs du secteur des communications électroniques justifie ce tempérament temporaire à la nullité de plein droit.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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