La Cour de justice de l’Union européenne, par une décision du 27 juin 2013, précise les conditions de validité des taxes sectorielles en matière de télécommunications. La législation d’un État membre a instauré un droit d’accise de trois pour cent sur les services de téléphonie mobile, incluant abonnements et cartes prépayées. Deux opérateurs titulaires d’une autorisation générale ont contesté ce prélèvement devant la première chambre du tribunal civil national en invoquant une violation du droit européen. Le juge de première instance a rejeté la demande en estimant que la taxe frappait la consommation finale et non le droit d’exercer l’activité. Saisie en appel, la juridiction constitutionnelle nationale a sursis à statuer pour interroger les juges de l’Union sur l’interprétation des articles douze et treize. Le litige porte sur la compatibilité d’une taxe nationale calculée sur les paiements perçus auprès des utilisateurs avec les limites posées par la directive. Les juges considèrent que la directive ne s’oppose pas à une taxe dont le fait générateur réside dans l’utilisation effective des services de téléphonie. Le raisonnement de la juridiction repose sur une délimitation stricte du champ d’application des charges administratives avant de définir le critère du fait générateur.
**I. L’encadrement strict des prélèvements liés au système d’autorisation**
**A. L’inapplicabilité des redevances pour droits d’utilisation des ressources**
La juridiction écarte d’emblée l’article treize de la directive car ce texte « porte sur les modalités d’imposition de redevances pour les droits d’utilisation ». Le prélèvement litigieux ne concerne pas l’usage de radiofréquences ou de numéros, mais s’applique globalement à la fourniture de services de téléphonie mobile. Cette disposition vise exclusivement à assurer une utilisation optimale des ressources rares comme le spectre hertzien ou les droits de passage sur les biens. En conséquence, le droit d’accise national ne peut être analysé sous cet angle puisque son assiette concerne les revenus générés par les communications habituelles. L’analyse se déplace logiquement vers le régime des taxes administratives afin de vérifier si la charge fiscale respecte les coûts de régulation du marché.
**B. La nature rémunératoire limitée des taxes administratives**
L’article douze prévoit que les taxes administratives imposées aux entreprises fournissant un service « couvrent exclusivement les coûts administratifs globaux » de la gestion du régime. Ces charges présentent un caractère rémunératoire car elles compensent les services accomplis par les autorités de régulation pour assurer le bon fonctionnement du marché. Le juge rappelle que les États peuvent uniquement financer quatre activités : la délivrance, la gestion, le contrôle et la mise en œuvre de l’autorisation. Dès lors, toute contribution excédant strictement le coût réel de ces missions de surveillance est incompatible avec les objectifs de simplification du marché intérieur. La validation de la taxe dépendra donc du lien existant entre le prélèvement financier et le processus administratif d’accès au marché des communications électroniques.
**II. La validation d’un droit d’accise assis sur la consommation effective**
**A. La distinction entre le droit d’opérer et l’usage du service**
Le critère déterminant réside dans le lien entre la taxe et la procédure permettant aux entreprises d’accéder légalement au marché des communications électroniques. Une taxe dont le fait générateur est l’utilisation des services « par un abonné ne supposait pas la fourniture d’un réseau » au sens strict. Le prélèvement litigieux est supporté en définitive par l’utilisateur final et correspond à un pourcentage des paiements perçus pour les prestations de téléphonie. Ce droit d’accise s’apparente ainsi à une taxe sur la consommation dont le déclenchement est indépendant de l’octroi initial des droits d’exercice professionnel. Cette nature spécifique permet de situer la contribution en dehors du périmètre harmonisé par la directive pour toucher directement la capacité contributive des usagers.
**B. La préservation d’une marge de manœuvre fiscale nationale**
La décision confirme que l’harmonisation européenne des réseaux ne prive pas les autorités nationales de leur pouvoir souverain en matière de fiscalité indirecte. Les limites posées par la directive visent à empêcher des barrières à l’entrée mais ne font pas obstacle à des taxes frappant la consommation. Il appartient néanmoins au juge national de vérifier que la charge fiscale est effectivement transférée à l’usager et non prélevée sur l’autorisation elle-même. Cette interprétation équilibrée garantit la libre prestation de services tout en autorisant le financement des politiques publiques par des impôts classiques de consommation.