Cour de justice de l’Union européenne, le 30 mai 2013, n°C-677/11

La Cour de justice de l’Union européenne a rendu, le 30 mai 2013, un arrêt relatif à la qualification des cotisations interprofessionnelles au regard des aides d’État.

Ce litige porte sur l’interprétation de l’article 107, paragraphe 1, du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne concernant la notion fondamentale de ressources d’État.

Une organisation interprofessionnelle reconnue avait instauré une cotisation obligatoire pour financer des actions de communication et de recherche au bénéfice exclusif de sa propre filière agricole.

L’autorité administrative nationale a décidé d’étendre cet accord privé par voie d’arrêté, rendant ainsi le prélèvement obligatoire pour l’ensemble des professionnels du secteur concerné.

Deux sociétés d’élevage ont contesté cette décision devant le Conseil d’État, invoquant une méconnaissance de l’obligation de notification préalable des aides d’État à la Commission européenne.

La juridiction administrative française a sursis à statuer afin d’interroger la Cour sur la nature juridique de ce financement et sur son éventuelle qualification étatique.

Il convient de déterminer si l’intervention d’une autorité publique étendant une cotisation privée suffit à caractériser l’utilisation de ressources d’État au sens du droit de l’Union.

La Cour a conclu que cette décision d’extension ne constituait pas un élément d’une aide d’État, écartant ainsi l’application des contraintes liées au contrôle des aides publiques.

Cette solution repose sur l’absence de mobilisation de ressources publiques (I) et sur l’absence d’imputabilité de la mesure à la puissance publique nationale (II).

I. L’absence de mobilisation de ressources étatiques

A. La nature privée des fonds collectés

La Cour souligne que les sommes litigieuses « proviennent d’opérateurs économiques privés » exerçant une activité sur les marchés concernés sans jamais transiter par le budget de l’État.

Ce mécanisme n’implique aucun transfert direct ou indirect de ressources publiques, puisque l’État ne renonce à aucun impôt qui aurait dû être versé au Trésor.

Ces cotisations conservent leur « caractère privé pendant tout leur parcours » et sont recouvrées selon les procédures classiques du droit civil ou du droit commercial.

B. L’absence de contrôle public effectif sur les ressources

L’article 107 du Traité ne s’applique que si les fonds restent constamment sous contrôle public et à la disposition immédiate des autorités nationales compétentes.

Les autorités nationales ne peuvent pas effectivement utiliser ces sommes pour soutenir des entreprises selon des choix discrétionnaires ou dans le cadre de politiques publiques.

C’est l’organisation interprofessionnelle qui décide seule de l’utilisation de ces ressources, lesquelles sont entièrement consacrées à des objectifs qu’elle a elle-même déterminés.

II. L’absence d’imputabilité de la mesure à l’État

A. L’initiative professionnelle prépondérante

La décision d’imposer cette charge financière émane exclusivement de l’organisation professionnelle, laquelle est une association de droit privé ne faisant pas partie de l’administration publique.

Les autorités nationales n’agissent ici que comme un simple « instrument » afin de donner une force obligatoire à des contributions instituées pour des objectifs purement privés.

Le juge européen précise que l’initiative de la campagne publicitaire ou de recherche appartient aux seuls acteurs du milieu concerné et non aux pouvoirs publics.

B. La portée limitée de l’intervention administrative

Le contrôle exercé par l’autorité administrative lors de la procédure d’extension se limite strictement à la régularité des actes et à leur conformité à la loi.

La réglementation n’autorise pas l’État à soumettre ces fonds à des objectifs politiques concrets ou à diriger l’administration interne de l’organisme professionnel de droit privé.

L’influence étatique résultant de l’acte administratif d’extension ne permet pas de conclure que les actions menées par l’organisation interprofessionnelle sont juridiquement imputables à l’État.

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Hassan KOHEN
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Hassan Kohen

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