Juge des référés du Conseil d’État, le 13 mai 2025, n°504206

Par une ordonnance rendue le 13 mai 2025, le juge des référés du Conseil d’Etat s’est prononcé sur l’étendue de sa compétence matérielle. Cette affaire concerne une requête visant à l’annulation de plusieurs actes accomplis dans le cadre d’une procédure devant le juge des enfants.

Un particulier a formé une requête afin d’obtenir l’annulation de mesures ordonnées par le juge des enfants du tribunal judiciaire de Carcassonne. Il sollicitait également la récusation de ce magistrat et la remise en cause de rapports établis par des techniciens sociaux. Invoquant l’article L. 521-3 du code de justice administrative, le requérant dénonçait une méconnaissance de ses droits et de l’accès à la justice. Il critiquait notamment le refus d’accès à son aide humaine et une irrégularité dans la convocation à une expertise psychiatrique.

La question de droit posée est de savoir si le juge des référés administratif peut connaître d’actes rattachés à une instance judiciaire. Le Conseil d’Etat décide de rejeter la demande, estimant que ces prétentions ne ressortissent manifestement pas à la compétence de l’ordre administratif. L’étude de cette décision nécessite d’analyser d’abord les fondements de l’incompétence administrative avant d’observer les modalités de rejet de la requête.

I. L’affirmation de l’incompétence de la juridiction administrative

A. Le lien nécessaire entre la mesure de référé et le litige principal

Le magistrat rappelle que sa compétence en premier et dernier ressort est conditionnée par la nature du litige principal. Aux termes de l’ordonnance, l’urgence ne peut être constatée que si l’affaire relève directement du Conseil d’Etat. Cette règle stricte évite que la haute juridiction ne devienne une instance d’appel systématique pour toutes les mesures de référé. En l’espèce, le juge des référés ne pouvait être saisi que si le litige de fond présentait un caractère administratif. Le Conseil d’Etat vérifie ainsi la régularité de sa propre saisine avant d’examiner les griefs soulevés par le demandeur.

B. L’exclusion des actes rattachés à l’autorité judiciaire

Les conclusions portaient sur une procédure menée devant le juge des enfants du tribunal judiciaire de Carcassonne et sur des actes de techniciens sociaux. Or, le juge administratif ne peut s’immiscer dans le fonctionnement interne des juridictions de l’ordre judiciaire. La décision affirme que de telles demandes « ne relèvent manifestement pas de la compétence du juge administratif ». Le juge des référés ne peut donc interférer dans le déroulement d’une instance civile sans méconnaître les limites de son office. Cette solution protège l’autonomie de la justice judiciaire contre toute intrusion de la part de l’administration.

II. La mise en œuvre d’une procédure d’éviction rapide

A. L’usage de l’ordonnance de tri pour incompétence manifeste

En vertu de l’article L. 522-3 du code de justice administrative, le juge peut rejeter la requête sans instruction ni audience. Ce mécanisme permet d’écarter promptement les demandes dont l’incompétence est évidente au seul vu des pièces du dossier. Le recours à cette ordonnance motivée assure une bonne administration de la justice en évitant des débats inutiles sur la forme. En effet, le caractère manifeste de l’incompétence rendait toute phase contradictoire superflue dans le cadre de ce référé mesure utile. Le magistrat administratif exerce ici son pouvoir de police de l’audience pour préserver l’efficacité des procédures d’urgence.

B. La préservation de l’étanchéité entre les ordres de juridiction

Cette décision confirme l’impossibilité de contester les actes d’instruction judiciaire devant le juge administratif par la voie du référé. Elle préserve l’indépendance de chaque ordre de juridiction et évite tout conflit d’interprétation sur la validité des procédures privées. Le juge administratif s’interdit ainsi de se transformer en un organe de contrôle disciplinaire ou hiérarchique des magistrats judiciaires. Cette solution classique rappelle la force de la séparation entre l’administration et l’autorité judiciaire dans l’ordonnancement juridique français. Elle assure que les litiges relatifs à la protection de l’enfance demeurent sous le contrôle exclusif des tribunaux judiciaires.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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