Juge des référés du Conseil d’État, le 27 juin 2025, n°505541

Par une ordonnance rendue le 27 juin 2025, le juge des référés du Conseil d’État statue sur la légalité des aménagements accordés à un candidat en situation de handicap. Atteint d’un trouble du spectre autistique, le requérant contestait les modalités d’organisation de ses épreuves orales de français prévues pour l’examen du baccalauréat. Il refusait la présence d’un assistant jugé perturbateur et exigeait que le jury soit informé de la nature précise de sa pathologie afin d’éclairer l’évaluation. Saisi en première instance, le juge des référés du tribunal administratif de La Réunion rejette sa demande de suspension par une ordonnance du 12 juin 2025. L’étudiant interjette appel devant la haute juridiction administrative sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative. Le problème juridique réside dans l’existence d’une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale du fait des modalités compensatoires retenues par l’administration. La juridiction souveraine confirme la décision de premier ressort en estimant que les griefs soulevés ne caractérisent pas l’illégalité manifeste exigée en référé. Cette analyse conduit d’abord à examiner l’encadrement du droit à la compensation avant d’étudier les limites du contrôle exercé par le juge de l’urgence.

I. L’encadrement normatif des aménagements d’épreuves pour les candidats handicapés

A. La consécration du droit à la compensation des conséquences du handicap

Aux termes de l’article L. 114-1-1 du code de l’action sociale et des familles, toute personne handicapée bénéficie d’un droit à la compensation de ses déficiences. Ce principe fondamental impose à l’administration de répondre aux besoins spécifiques liés à la scolarité par des aménagements garantissant le plein exercice de la citoyenneté. L’article L. 112-4 du code de l’éducation prévoit que ces mesures peuvent inclure « la présence d’un assistant » ou « un dispositif de communication adapté ». L’objectif de ces dispositions demeure la garantie de l’égalité des chances entre les candidats lors des examens nationaux. L’autorité académique doit ainsi concilier les besoins de l’élève avec les contraintes organisationnelles et réglementaires propres aux concours de l’enseignement scolaire.

B. L’équilibre entre l’égalité des chances et le respect de l’anonymat

Le droit à la compensation rencontre des limites textuelles destinées à préserver l’impartialité du jury et la neutralité des évaluations académiques. Selon l’article D. 351-31 du code de l’éducation, les examinateurs sont informés des aménagements mis en œuvre « dans le respect de la règle d’anonymat des candidats ». La décision précise que le président du jury reçoit l’information relative aux aides accordées sans que la nature exacte du handicap ne soit révélée. Cette restriction protège la vie privée du candidat tout en permettant aux membres du jury d’adapter leur cadre d’évaluation aux circonstances matérielles. Le juge valide ce dispositif en soulignant que l’information sur les aménagements suffit à garantir l’équité du traitement sans nécessiter une divulgation pathologique complète.

II. L’absence d’atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale

A. L’appréciation souveraine du caractère préjudiciable des mesures compensatoires

Le requérant soutenait que la présence d’une tierce personne lors de son oral constituerait une source d’angoisse dévalorisante plutôt qu’une aide effective. Le juge des référés observe néanmoins que la décision litigieuse invitait l’étudiant à « notifier au rectorat son éventuel souhait de ne pas bénéficier » de cet aménagement. Cette clause de renonciation possible prive de fondement l’argumentation relative au caractère préjudiciable de l’assistance initialement prévue par les services académiques compétents. La haute juridiction considère que l’existence d’une faculté de choix pour le candidat exclut toute contrainte illégale exercée par la puissance publique sur l’intéressé. La mesure critiquée ne saurait constituer une atteinte aux droits de l’enfant mineur puisque sa mise en œuvre restait subordonnée à l’accord du principal intéressé.

B. La stricte application des conditions du référé-liberté par la haute juridiction

Le Conseil d’État rejette la requête en rappelant que la procédure prévue à l’article L. 521-2 du code de justice administrative exige une illégalité flagrante. Les circonstances de l’espèce ne permettent pas de conclure que l’administration aurait commis une faute lourde ou manifestement disproportionnée dans l’organisation du service public. La décision souligne que le refus d’informer le jury sur la nature du syndrome autistique ne porte aucune « atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale ». Le juge de l’urgence maintient un seuil de recevabilité élevé pour éviter de s’immiscer indûment dans les prérogatives pédagogiques des autorités académiques compétentes. L’ordonnance confirme que les garanties offertes par le droit de l’éducation en matière de handicap sont suffisantes pour assurer la régularité de la session d’examen.

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Hassan KOHEN
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