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La décision soumise à notre examen émane de la chambre criminelle de la Cour de cassation, rendue le 18 juin 2025. Elle porte sur un pourvoi formé contre un arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, chambre de l’application des peines, en date du 19 novembre 2024, relatif à la révocation d’une liberté conditionnelle.
Les faits à l’origine du litige concernent un condamné qui bénéficiait d’une mesure de liberté conditionnelle. Cette mesure a fait l’objet d’une procédure de révocation devant la juridiction de l’application des peines. La chambre de l’application des peines de la cour d’appel d’Aix-en-Provence a statué sur cette révocation par un arrêt du 19 novembre 2024, dont la teneur exacte n’est pas précisée dans la décision commentée.
Le condamné a formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt et a produit un mémoire personnel à l’appui de son recours. L’affaire a été examinée par la chambre criminelle, composée en formation restreinte conformément à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale. L’audience publique s’est tenue le 21 mai 2025.
La question de droit soumise à la Cour de cassation consistait à déterminer si le pourvoi présentait des moyens de nature à justifier son admission, c’est-à-dire des moyens sérieux susceptibles de conduire à une cassation de l’arrêt attaqué.
La Cour de cassation, après avoir « examiné tant la recevabilité du recours que les pièces de procédure », constate « qu’il n’existe, en l’espèce, aucun moyen de nature à permettre l’admission du pourvoi ». Elle déclare en conséquence le pourvoi non admis.
Cette décision de non-admission illustre le mécanisme de filtrage des pourvois instauré par le législateur. Elle invite à s’interroger sur la portée de la procédure de non-admission en matière pénale (I), avant d’analyser les implications de cette décision pour le justiciable et le système judiciaire (II).
I. Le mécanisme procédural de la non-admission des pourvois en matière pénale
A. Le fondement légal de la procédure de filtrage
L’article 567-1-1 du code de procédure pénale, visé par la décision, constitue le fondement de la procédure de non-admission des pourvois en matière pénale. Ce texte, introduit par la loi du 25 juin 2001 puis modifié à plusieurs reprises, permet à la chambre criminelle de rejeter un pourvoi par une décision non motivée lorsque celui-ci ne présente aucun moyen sérieux de cassation.
La formation restreinte qui statue sur l’admission comprend le président de la chambre et deux conseillers, comme l’indique la décision en mentionnant la composition de la juridiction. Cette formation allégée permet un examen rapide des pourvois manifestement dépourvus de fondement. Le rapporteur, en l’espèce un conseiller référendaire, présente son rapport, et l’avocat général formule ses conclusions avant que la chambre ne délibère.
La décision commentée applique strictement ce dispositif. La Cour indique avoir examiné « tant la recevabilité du recours que les pièces de procédure », ce qui démontre un contrôle effectif bien que sommaire. L’absence de moyens « de nature à permettre l’admission » justifie le rejet du pourvoi sans qu’il soit nécessaire de motiver davantage cette décision.
B. La spécificité du contrôle exercé par la Cour de cassation
Le contrôle opéré dans le cadre de l’article 567-1-1 présente une double dimension. La Cour vérifie d’abord la recevabilité formelle du pourvoi : respect des délais, qualité pour agir, régularité de la déclaration de pourvoi. Elle examine ensuite le fond des moyens invoqués pour apprécier leur caractère sérieux.
En l’espèce, le demandeur avait produit un mémoire personnel, c’est-à-dire un mémoire rédigé sans le concours d’un avocat aux Conseils. Cette circonstance mérite attention. Les mémoires personnels, bien que recevables, présentent souvent des faiblesses techniques qui réduisent leurs chances de succès. L’absence de représentation par un avocat spécialisé peut conduire à une formulation inadaptée des moyens ou à l’invocation d’arguments inopérants en cassation.
La formule lapidaire employée par la Cour, constatant l’absence de « moyen de nature à permettre l’admission », ne permet pas de savoir si le pourvoi échouait sur la recevabilité ou sur le fond. Cette indétermination caractérise les décisions de non-admission et constitue l’une de leurs principales critiques.
II. Les enjeux de la non-admission en matière d’application des peines
A. La singularité du contentieux de la révocation de liberté conditionnelle
La liberté conditionnelle constitue une mesure d’aménagement de peine permettant au condamné de purger la fin de sa peine en dehors de l’établissement pénitentiaire, sous certaines conditions. Sa révocation intervient lorsque le bénéficiaire manque à ses obligations ou commet une nouvelle infraction. Cette décision emporte des conséquences graves puisqu’elle entraîne généralement la réincarcération du condamné.
Le contentieux de la révocation relève de la chambre de l’application des peines de la cour d’appel, comme l’illustre la décision attaquée émanant de la cour d’appel d’Aix-en-Provence. Les voies de recours contre ces décisions sont encadrées par le code de procédure pénale, le pourvoi en cassation demeurant la dernière voie de droit.
La non-admission du pourvoi dans ce contexte ferme définitivement les voies de recours internes. Le condamné dont la liberté conditionnelle a été révoquée n’a plus de recours juridictionnel national. Cette situation soulève des interrogations sur l’effectivité du droit au recours dans un domaine touchant directement à la liberté individuelle.
B. La portée limitée mais significative de la décision
La décision de non-admission ne constitue pas un précédent jurisprudentiel au sens traditionnel. Elle ne tranche aucune question de droit nouvelle et ne pose aucun principe susceptible de guider les juridictions du fond. Son caractère non motivé empêche d’en tirer des enseignements sur l’état du droit applicable.
Cette absence de motivation répond à un objectif de célérité et de désengorgement de la Cour de cassation. Le législateur a considéré que les pourvois manifestement infondés ne méritaient pas un traitement approfondi mobilisant les ressources de la haute juridiction. Ce choix se justifie par la nécessité de préserver la capacité de la Cour à remplir sa mission d’unification du droit.
La décision commentée s’inscrit dans le fonctionnement ordinaire de la chambre criminelle. Elle témoigne de l’efficacité du filtre mis en place, qui permet d’écarter rapidement les pourvois sans mérite. Elle illustre également les limites du mémoire personnel face aux exigences techniques du pourvoi en cassation. Le demandeur, privé de l’assistance d’un avocat aux Conseils, n’a pas su formuler des moyens susceptibles de retenir l’attention de la Cour. Cette réalité interroge l’égalité d’accès à la justice suprême entre les justiciables disposant de moyens financiers suffisants pour recourir à un avocat spécialisé et ceux qui en sont dépourvus.